mardi 11 octobre 2011

"Le paradoxe des parasites."

Même revue, même auteur que l'article précédent (Tout travail mérite-t-il...?).
Je fais un peu dans la facilité ces temps. Vous m'excuserez. But... toutes ces plateformes d'échanges informatiques, ces réseaux sociaux, servent bien à "échanger" des trucs qu'on aime bien: photos, infos, souvenirs, liens, et articles divers...et variés.

Donc place à Pierre Rimbert, encore une fois.

"Quinze milliards trois cent millions de dollars provisionnés par la banque américaine Goldman Sachs pour récompenser ses courtiers en 2010; 1 milliards d'euros épargné par BNP Paribas en prévision du versement des primes à ses acrobates financiers; 16 milliards d'euros de bonus versés aux traders de la City, à Londres, entre avril 2010 et mars 2011... En 2008 déjà, 32,6 milliards de dollars étaient versés sous forme de primes par neuf établissements de Wall Street qui, dans le même temps, percevaient 175 milliards d'aides publiques, selon les conclusions de l'enquête menée par le procureur général de l'Etat de New York, M. Andrew Cuomo. Un temps perturbée, la routine de l'accaparement a repris son cours.

Bien que situés quelques barreaux en dessous sur l'échelle de la démesure, ces montants évoquent ceux mobilisés par les puissances publiques pour sauver les institutions financières de l'effondrement.
Depuis la chute de la banque Lehman Brothers, en septembre 2008, les chefs d'Etat et banquiers centraux se sont, littéralement, mis au service des banques privées. Avec l'argent du contribuable, ils ont nationalisé les plus claudicantes, racheté les créances pourries détenues par les autres, injecté des centaines de milliards de dollars dans leurs fondations branlantes, inondé les guichets d'un flot illimité et pratiquement gratuit de liquidités, garanti leurs avoirs douteux. Au plus fort de la tempête, les puissances publiques se sont substituées à des établissements soudain incapables de remplir leur principale fonction: irriguer l'économie en crédit.

C'est là tout le paradoxe des parasites. En l'espace de quelques mois, les banques d'affaires privées ont successivement démontré leur nullité (politique de prêts reposant sur l'idée que les prix de l'immobilier grimperaient éternellement, accumulation explosive de créances douteuses), leur nocivité (funambulisme spéculatif sur les dettes souveraines, le pétrole, les produits alimentaires et les matières premières), leur fragilité (le naufrage de l'une déclenche une crise mondiale du crédit), leur inutilité (l'Etat les remplace sans dommage) et, enfin, l'insatiable cupidité de leurs dirigeants - sans qu'il en soit tiré aucune conséquence pratique. Nationaliser franchement, et durablement, l'ensemble du secteur aurait-il été plus coûteux?

Malgré les communiqués triomphaux des membres du G20 (dont la Chine, la Russie, le Brésil, l'Argentine, l'Afrique du Sud) réunis à Londres en avril 2009 pour "réformer le capitalisme" et ramener ses acteurs à plus de raison, le sauvetage des géants de la finance n'a été assorti d'aucune condition digne de ce nom. Comme l'indiquent les profits enregistrés depuis la crise par Goldman Sachs, Citigroup, Barclays, BNP Paribas, HSBC, etc., la rente bancaire sort intacte d'une crise qui prive d'emploi des dizaines de millions de salariés; elle accomplit l'exploit d'unir dans une commune réprobation des contribuables détroussés par des tarifs exorbitants et soumis à la gabelle du renflouage, les chefs d'entreprise étouffés par la restriction du crédit et les actionnaires effarés par le montant de bonus qui amputent d'autant leurs dividendes!

Dans la Grèce antique, l'hubris, cette aspiration violente à la démesure, appelait la némésis, le châtiment par la destruction. Mais quel gouvernement se risquerait à réprimer un secteur où se recrutent et se recyclent tant de cadres du pouvoir politique?"

N.

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