samedi 29 août 2015

L'Etat démocratique devient sécuritaire pour servir la ploutocratie.

« On ne peut pas laisser des élections changer quoi que ce soit. »
C’est clair, net et sans appel. Cette petite phrase a été lâchée par l’un des ministres les plus influents au sein de l’Union européenne.

Plus près de chez moi, Johann Schneider-Amman entrepreneur et Ministre de notre économie, dira, au sujet d’une ancienne votation qui n’a pas encore vraiment montré les effets négatifs – prétendument pour l’économie nationale, du choix Helvétique :
« On a bien compris le message le 9 février. On a probablement pas assez informé, influencé et soutenu le peuple Suisse avant. »
A se demander comment les peuples sont considérés par ceux qui les dirigent ?

D’un côté des populations se rendent aux urnes pour choisir celui qui semble être le meilleur présidentiable afin de lui confier le mandat qui portera la nation vers des lendemains meilleurs.
Ce qui a fait dire à un certain François Hollande, en direct sur BFMTV, juste après la débâcle des Municipales en 2014, qui sanctionnait l’échec de sa politique intérieure :
« 2012, si j’ai gagné, ce n’est pas parce que j’avais un programme étincelant. C’est sans doute parce que mon prédécesseur avait échoué. »
De l’autre, il y a des populations qui croient encore que leur avis sur tel ou tel sujet compte aux yeux de celui qui pose la question, mais qui votent n’importe quoi quand elles ne sont pas influencées.
N’est-ce pas pour cela qu’existent les consignes de vote ?

Qu’ils soient locataires des diverses résidences présidentielles bâties dans les capitales des Etats de la belle UE, ou qu’ils représentent ces mêmes Etats au sein d’une commission européenne lézardée et, pourquoi pas, corrompue, l’intérêt de tous ces dirigeants n’est plus le respect de la démocratie, n’est plus le respect des peuples exogènes qui meurent au-delà des grillages de l’UE, et ce n’est plus la défense des intérêts des populations nationales qui subissent les désaveux successifs d’un système que leurs aïeux ont péniblement mis en place.
On encourage le travail ‘’temporaire’’ et on facilite les licenciements tout en prenant soin de désengorger les salles d’attentes des Prud’hommes.

« La reprise pour le prochain trimestre » ; « la reprise au prochain semestre » ; « la reprise espérée pour l’années prochaine ».
Oui ! Il faut absolument de la ‘’reprise’’ avant que les ouvriers locaux ne se révoltent, usés par les plans de restructurations successifs qui continuent de garantir de belles rentes aux actionnaires et des salaires mirobolants aux membres de la ‘’direction’’.
La reprise traîne. Les Maghrébins travaillent en Espagne, ou ailleurs ; les Espagnols migrent vers l’Allemagne, ou ailleurs. Les travailleurs de l’ailleurs râlent contre le dumping salarial – qui officiellement n’existe pas, et ne veulent plus voir de ces européens du sud dans leurs usines.
Qu'à cela ne tienne... une nouvelle main-d’œuvre ukrainienne est disponible et encore meilleur marché qu’un Espagnol ruiné.
La reprise tarde. L’opinion publique européenne fait mine de se réveiller sur les conditions des accords TAFTA-TTIP. Un port chinois explose. La bourse de Pékin dévisse. Le monde se casse la gueule.
Les spécialistes financiers médiatiques de l’écran plat prennent le relais pour entretenir l’anxiété que les téléspectateurs doivent ressentir sur le sort de nos économies nationales. Ils tentent de nous démontrer catastrophiquement, par de savantes explications, ce que Pékin a décidé il y a deux ou trois ans.
Soit : De revoir volontairement sa ‘’croissance’’ à la baisse et de privilégier son marché intérieur.

Quelque chose de nauséabond est en train de se mettre en place. Une restructuration massive des conditions de travail à un niveau européen, si ce n’est mondial. Une réorganisation qui n’ira pas dans le sens du ‘’demos’’.
Et pour que tout le monde comprenne bien que l’on ne s’oppose pas à une nouvelle gouvernance mondiale, il fallait un exemple. L’humiliation d’une nation.

Un proverbe Grec dit : « Seul ton ongle sait où te gratter. »
Alors quand un ministre des finances Grec fait de concrètes propositions à ses confrères européens pour sortir son pays de la m….. , ceux-ci, au lieu d’écouter et de tenir compte de l’expertise d’un homme qui connaît l’état financier catastrophique de son pays ainsi que la misère à laquelle ses compatriotes sont confrontés, les élus qui ne vivent pas à Athènes se permettent de dire, ouvertement, aux Européen-ne-s qui écoutent que les propositions Grecques sont « mal ficelées » ; « peu crédibles »…
Parce que pas conformes aux désirs de Berlin & Co.

Alors le président de l’Eurogroupe, Monsieur Dilsselbloem convoque une réunion des ministres des finances de l’UE – la deuxième du 27 juin 2015 ; ce même président exclut volontairement et ouvertement le ministre des finances Grec ; et quand ce dernier proteste en arguant « qu’il n’avait pas le droit, seul, d’exclure le Ministre des finances d’un Etat membre » et exige une « clarification à ce sujet », c’est le secrétariat de l’eurogroupe qui lui répond :
« L’Eurogroupe n’a pas d’existence légale. Il s’agit d’un groupe informel et, en conséquence, aucune loi écrite ne limite l’action de son président. »
Et pour être bien sûr d’imposer un peu plus le pouvoir d’un groupe ‘’informel’’, Monsieur Schäuble, ministre des finances allemand dira, au sujet des votes Grecs, le fameux :
« On ne peut pas laisser des élections changer quoi que ce soit. »

Dès lors le pouvoir des peuples se retrouve confronté au pouvoir des riches. La BCE ferme le robinet et les Grecs peuvent ‘’se gratter’’ en faisant la queue devant leurs banques nationales pour retirer leur aumône  quotidienne.
Les peuples élisent des hommes politiques qui exerceront leur ‘’mandat’’ en fonction des lobbies qui les ont financé et mettent un place un pouvoir « qui n’a pas d’existence légale » qui finira par nuire à celles et ceux qui les ont plébiscité.

Quelques centaines d’hommes, qui n’ont plus grand-chose à perdre, iront manifester et affronter leurs concitoyens dans des bagarres de rues que les médias se feront un plaisir de retransmettre en direct. Histoire de nous montrer que l’homme sous l’uniforme ne recule devant rien pour préserver l’ordre des multinationales qui dirigent (encore) dans la pénombre.
Ainsi verrons-nous des groupes d’interventions policiers, bien équipés, constitués de quelques hommes courageux qui s’opposent à l’anarchie.

A l’époque décriée du communisme, le citoyen pouvait critiquer son patron. Mais il ne devait, ni pouvait, critiquer le pouvoir en place. Sous peine de douloureuses sanctions.
Le mur est tombé et le capitalisme a pu se répandre bien au delà des limites de l’ancienne RDA.
Aujourd’hui le monde est quasi néolibéralisé. Les élites politiques sont satirisées, et bien souvent ouvertement critiquées, sans que le détracteur n’encoure la moindre peine (sauf si on s’en prend à Mme Taubira) et le pouvoir de ‘’vie’’ ou de ‘’mort’’ échoit aux dirigeants d’entreprise, aux banquiers et aux sociétés financières.

Si l’accaparement des ressources exotiques promet des lendemains difficiles aux populations rurales tout aussi exotiques, c’est bien l’argent qui est devenu, dans notre monde moderne et civilisé, la denrée virtuelle dont il ne faut pas manquer sous peine de connaître une mort ‘’sociale’’, autrement douloureuse dans un monde orienté par la possession de ‘’biens’’ de consommations. Donc, et par extension, celui qui nous ‘’prête’’ de l’argent pour que nous puissions ‘’vivre’’, devient la personne à vénérer.

Je ne sais plus qui a dit : « A 50 ans, tout le monde devrait avoir une Rolex. »
La réussite sociale est devenue la seule échelle de valeur sur laquelle se mesure la dignité et l’honorabilité de l’être humain. Les reportages parlant des ‘’Destins de star’’, des réussites personnelles ou autres incursions télévisées dans le repaire des ultras riches, sont là pour attiser notre convoitise, pour nous donner envie de ‘’leur’’ ressembler. Quitte à mettre de côté tous nos préjugés moraux.
La famille nucléaire explose. Les amis se déchirent. Les collègues se jaugent et se jugent tous les six mois. Les grandes entreprises, destructrices de l’emploi national, délocalisent dans des Etats économiquement plus ‘’faibles’’ pour profiter d’une main d’œuvre bon marché.
La contrepartie à cette pratique, qui doit servir à maintenir la constante croissance de nos entreprises dirigeantes, est dans l’ouverture des frontières aux ressortissants des Etats financièrement colonisés.
C’est l’ouverture des entreprises locales à une main d’œuvre moins exigeante financièrement. Des ouvriers qui seront tout content de gagner 5x plus que leur ancien salaire. Même si le nouveau salaire est 30 à 50 % en dessous du revenu courant.

Malheureusement, si l’on peut dire, les flux migratoires, n’amènent pas uniquement, dans leur cortège de la misère, que des personnes honnêtes, intègres, persévérantes, etc. Le malfrat aussi, doit se réfugier.
La criminalité augmente donc. A moins que cela ne soit sa médiatisation qui ait augmenté. Ou les deux.
La maffia est devenue Russe, puis Albanaise avant d’influencer, dans ses pratiques, les ‘’passeurs’’ Nord-Africains. Les incivilités sont dues à la présence des populations allophones, non pas à la démission forcée des parents. Les vols ‘’à l’arraché’’, les cambriolages, le racket, le car-jacking, les attaques à mains armées, etc. sont le fait d’une minorité de ces étrangers à qui nous ouvrons nos frontières, entendons-nous dire fréquemment.
Les populations autochtones s’inquiètent, avec l’aide des médias. Les politiques n’arrivent pas à se décider entre la fermeture des frontières ou l’augmentation des effectifs policiers. Les habitants achètent des systèmes de surveillance à distance et regardent dans œil mauvais tout ce qui n’a pas la teinte du résidant AOC.

Dès lors est-il surprenant de voir de vigiles, des agents de sécurité, des bodyguards qui arpentent, en plus de la police, tous les lieux publics où nous nous retrouvons ?
La présence de l’uniforme serait là pour nous protéger, disent les multiples ‘’panneaux’’ qui signalent la présence d’une surveillance. Je veux bien, mais nous protéger de quoi, de qui ?
Parce que la visibilité de l’uniforme a plutôt comme objectif la dissuasion. L’homme en uniforme, le vigile ou l’agent de sécurité, est surtout là pour que nous respections les règles imposées par le propriétaire des lieux que nous traversons.
Parce que les centres commerciaux dans lesquels nous faisons nos emplettes, par exemple, sont des lieux privés ouverts au public.
Un propriétaire des lieux qui a tout intérêt à ce que nous soyons bien à l’aise dans l’enceinte de son temple.
La présence de l’uniforme a bien un effet dissuasif sur la petite délinquance en culotte courte qui chaparde dans les rayons. Mais honnêtement, si ce que nous ‘’piquons’’ représente, en valeur marchande, le 10 % de ce qu’un centre commercial, comme Manor à Vevey par exemple, fout annuellement comme denrées alimentaires ou vêtements neufs ou objets utilisables à la poubelle, c’est que les p’tits voleurs ont bien bossé.

L’uniforme est là pour nous informer de deux choses : la première est que si nous faisons un acte qui déplait au maître des lieux, il interviendra en faisant appel à la police. La seconde découle de la première puisqu’elle nous ‘’assure’’ de pouvoir cheminer entre les différentes boutiques sans être gêné par des ados qui courent dans tous les sens, qui posent leur cul n’importe où pour bouffer leur Mac Do, qui écoutent de la musique ou parlent trop fort, etc.
Le vigile c’est un peu ce chien de berger, dressé pour que les moutons restent bien en ‘’troupeaux’’ et suivent les pas du proprio. Le chien peu aboyer pour rappeler les moutons à l’ordre, mais il ne mord pas.

La Police, c'est le chien qui mord. Son rôle est de maintenir l’ordre public et de veiller au respect des lois qui encadrent cet ‘’ordre’’. En plus de sa mission qui est, accessoirement, de nous protéger.
Mais là aussi, la même question que plus haut se pose : Nous protéger de qui et de quoi ?
Des individus louches au comportement suspect !? Ce qui nous renvoie à une frange des populations migrantes pas encore parfaitement intégrées dans le système qui les accueille.
La présence policière dans les rues n’est pas dissuasive, comme la présence du vigile dans un hypermarché, elle est préventive avant d’être répressive.
Si le big boss du centre commercial considère tous ses clients comme des voleurs potentiels, le big boss de la ville, ou de la nation, pense qu’il y a un criminel qui sommeille en chacun de nous.

La mission de ‘’prévention’’ consiste à nous montrer le bon comportement à adopter pour se mêler à la masse des concitoyens. Que ce soit dans les espaces publics ou en matière de circulation routière.
Cette mission, qui est d’une logique incontestable, est dans l’incapacité de ‘’prévoir’’ le moindre accident, le moindre larcin, la moindre violence.
Cela n’empêche pas les pouvoir, dits Publics, de renforcer sa surveillance sur les foules par le biais de systèmes électroniques et informatiques. La majorité des populations étant plus obéissante que le mouton, cela marche. Et pour être bien sûr que l’état est là pour te protéger de toi-même, dès que tu enfreins une loi ou une règle de ‘’comportement’’, tu es sanctionné.
Sanctionné, dans un premier temps, par une amende qui vient te prélever, dans ton porte-monnaie, ce que tu as de plus cher au monde : Ton fric.
Donc si tu ne veux pas que ton ‘’pouvoir d’achat’’ soit lésé, tu te conformes aux règles édictées par les laquais des sociétés multinationales et financières, soit : nos politiciens.

En France, la défiance aux forces de l’ordre est inscrite, si j’ose dire, dans les gènes de chaque Gaulois et s’exprime, pour d'autres raisons, plus violemment dans les cités de banlieues. Pour pallier à cette anarchie grandissante et sécuriser le territoire, il y a différentes manières pour rappeler aux fouteurs de troubles ‘’Qui dirige et décide’’.
L’une d’entres elles consiste à bombarder le téléspectateurs d’émissions genre ‘’ Envoyé spécial’’ ; ‘’En quête d’action’’, qui propose des reportages ‘’ en immersion’’ au sein d’une brigade d’intervention spécialisée quelconque. Un peu de ‘’réalité’’ pour beaucoup de mise en scène autour des reconstitutions.
Il y a aussi le changement de l’uniforme qui ‘’bat le pavé’’ devant des sites voulus sensibles.
Si la police n’effraie plus. Si le policier porte l’uniforme auquel il est possible de se confronter, qu’en est-il de l’uniforme militaire ? Allons-nous nous confronter à ce militaire qui, nous dit la pub, a appris à tuer ?

L’armée est visible parce qu’elle est là pour combattre un nouvel ennemi invisible : le djihadiste.
Sauf que pendant que le trouffion de base tourne en rond devant la Tour Eiffel, c’est bien l’entier des personnes présentes qui est sous surveillance.
Comme c’est bien sur l’entier des populations que sont braqués tous les systèmes de surveillances électroniques. Des systèmes qui vont s’améliorer et devenir encore plus inquisiteurs parce que le djihadiste est, en plus d’être invisible, imprévisible. Une aubaine pour tous les concepteurs de logiciels liberticides.

Maintenant que l’on sait que le système de surveillance, quel qu’il soit, ne me protège pas, mais est là pour me rappeler la ‘’sanction’’ si j’enfreins les règles, on peut se demander ‘’Qui’’ est protégé par ces systèmes ? Qui a besoin que nous soyons dociles ?

Le monde est virtuel. Les révolutions sont numériques, électroniques, informatiques. Toutes les publicités vont dans ce sens, tous les messages sont là pour nous faire croire que nous n’avons pas d’emprise sur l’économie mondiale, régionale ou locale. Ce qui est faux.
Si des milliards de milliards d’une quelconque monnaie circulent via des autoroutes numériques et vont se stocker dans des nuages artificiels, c’est par les voies de communications aériennes, maritimes et terrestres que les marchandises et la main d’œuvre se déplacent.
Donc si vous coupez ces voies de communications, c’est l’économie locale, régionale, et pourquoi pas mondiale, qui en subit les conséquences.

Le radar routier est un bon exemple de ce système de surveillance qui ‘’garanti’’ la fluidité du trafic.
Le radar ne me protège pas d’un ‘’fou du volant’’, mais son ‘’flash’’ me signale que je serai ‘’puni’’ pour avoir dépassé la vitesse maximale autorisée.
Le rôle du radar est donc de maintenir le plus possible d'utilisateurs du réseau surveillé à une vitesse constante afin que tout le monde puisse se rendre d'un point "A" au point "B" dans les meilleures conditions.
Maintenant, en cas de grosse casse sur le réseau autoroutier, un accident qui bloque deux voies de circulations, c’est toute la région autour de l’accident qui se retrouve ‘’impactée’’ par ce blocage de trafic. Mettant en retard aussi bien une mère devant récupérer son bambin, à la sortie de l’école ou à la garderie, le livreur de marchandise ou l’homme d’affaire se rendant à une réunion importante.
 
Dans l’ancienne Vevey, la première piste de bus qui fut ouverte aux taxis, n’a pas été le résultat d’âpres négociations entre les professionnels de la route et les élus de la Municipalité. La voie a été ouverte parce que, pris dans les embouteillages, un taxi et son ‘’important’’ passager – un ponte de nescafard, sont arrivés trop tard en gare de Nestlé-City.
La présence de toutes ces flottes américaines aux endroits maritimes stratégiques ne garanti pas la sécurité de populations côtières autochtones, mais assure et contrôle le bon passage des millions de tonnes de marchandises, de matières premières et autres d’un point sur le globe vers un autre. Faisant peser, au passage, un petit chantage sur tous les Etats vers lesquels sont destinés ces marchandises.
 
Le pouvoir, démocratiquement mis en place, ne protège pas l’homme d’un danger, si ce n’est de celui de manquer de sa ressource favorite, mais sécurise bien le chemin qui le mène vers son travail.

Nemo.

mercredi 19 août 2015

Res omnis.

L’Overshoot Day, le jour où nous avons consommé les ressources que la Terre peut produire en une année, arrive de plus en plus tôt.
Pour y parvenir, en plus de nos appétits dévastateurs, nous jetons chaque année plus de 1,5 milliards de tonnes de nourriture, soit un tiers de la production alimentaire globale qui est destinée à notre alimentation.
Un quart des aliments produits sont jetés sans même avoir été consommés, alors que14% de la population mondiale est sous alimentée – 526 millions de personnes en Asie.
Le coût financier direct de ce gâchis planétaire est évalué à 750 milliards de dollars.

[750'000'000'000 dollars. En francs Suisse ça fait en gros : 675 milliards de francs. C’est impossible à ‘’visualiser’’. Si je touchais un salaire mensuel de 5'000 francs, je devrais bosser pendant 11.25 millions d’années avant de pouvoir atteindre un tel montant. Sans avoir tenu compte du treizième salaire.]

Dans la belle UE : Près de 90 millions de tonnes de déchets alimentaires sont produits annuellement – soit 180 kilos de denrées gaspillées par personne. Selon les estimations, ce volume pourrait s’élever à 120 millions de tonnes en 2020.
En France. « Plus de 7 millions de tonnes de nourriture jetée par année. Un tiers encore emballé. »
Ce gaspillage est principalement le fait des ménages (environ 70%).
"La grande distribution est responsable de la perte annuelle de plus de 2 millions de tonnes d’aliments."
On peut aisément taper sur la tête des consommateurs en oubliant que les Super-hypermarchés attirent leur clientèle avec des prix trop bas pour être honnêtes ou en proposant des offres ‘’multipack’’, genre 3 pour 2, de denrées alimentaires. Tout ça pour nous encourager à la cuisine à outrance, à préparer plus qu’il n’en faut et mettre les in-consommés à la poubelle.

La planète a produit 308,5 millions de tonnes de viande en 2013 (67.7 tonnes de bœuf, 107 tonnes de volailles, 114 tonnes de porc…) Une production qui nécessite un détournement de 40% de la production agricole pour l’élevage.
D’un point de vue mondial, selon la base de données de la FAO, l’affectation des terres agricoles mondiales en 2012 ressemblait un peu à cela :
Sur les 4,81 milliards d’hectares disponibles sur la surface de notre globe, 3,4 servent aux pâturage, dont 0,85 sont des sols dégradés.
Les 1.41 milliards d’hectares restants, définis en terres arables, sont à partager entre les sols à fourrage (0.5) et ce qui reste de disponible pour l’alimentation humaine (0.91). Une part que l’humain concède à l’horticulture, aux agrocarburants, etc.

Mais il n’y a pas que la terre que nous dégradons et de la viande que nous surconsommons.
80% du produit de la pêche finit dans l’assiette des pays dit riches. L’accaparement de cette ressource, dont nous n’avons pas un besoin vital, participe à l’épuisement des ressources marines. Et désolé de dire ça, mais la destruction du milieu aquatique n’est plus un fantasme d’écolo.
La brutale disparition de la morue des Grands Bancs de Terre-Neuve, à la fin du XXe siècle, et que personne n’avait prévue, a été un avertissement planétaire. Victime d’une surpêche devenue industrielle, ce grand poisson d’eau froide n’est jamais revenu dans les eaux de Terre-Neuve, malgré le moratoire décidé par le gouvernement Canadien en 1992.
Entre 1992 et 2012, la biomasse du chinchard a chuté de 30 millions de tonnes à trois millions dans le Pacifique sud. Sur la même période, la population de mérous a diminué de plus de 80% en Afrique de l’Ouest.

Le continent Africain, déjà aux mains de ses colonisateurs qui se chamaillent les terres agricoles disponibles – chaque année des millions d’hectares de surfaces agricoles sont achetés par des multinationales ou des hommes d’affaires étrangers, voit ses ressources halieutiques disparaître dans le sillage des chalutiers européens, russes, sud-coréens, japonais, et maintenant chinois.
Des acteurs économiques qui viennent concurrencer déloyalement la pêche artisanale, mettant ainsi « directement en danger l’autosuffisance alimentaire des pays tiers ».
Il est possible de mettre l’accent sur la présence chinoise dans les eaux tropicales au large de l’Afrique, mais c’est bien l’Union européenne qui, en 2012, « disposait en effet du plus grand territoire maritime de la planète, d’environ cent quarante mille pêcheurs en équivalent temps plein, d’une flotte de plus de huitante cinq mille navires et d’un million d’emplois à terre dans les filières halieutiques. »
Résultat ? 88% des réserves marines communautaires sont surexploitées. Contre 25% au niveau mondial. Les eaux bleues qui ceignent la belle Union européenne, et accueillent tant de touristes irrespectueux de leur environnement, ne seront plus qu’aptes à accueillir des organismes anaérobies. Comme c’est le cas en Mer du Nord.
Surpêche, destruction des biotopes, pollutions ont détruit nos propres réserves. Qu’à cela ne tiennent ! Nous irons piller celles des autres.

« Le poisson constitue un apport hautement nutritif, riche en acides gras essentiels, et contribue de ce fait à près de 50% de la ration protéique animale dans de nombreux pays du Sud : Bangladesh, Gambie, Sénégal, Somalie, Sierra Léone… » Le poisson a même constitué une ressource alimentaire de secours pendant les épisodes de sècheresse (Somalie 1974 et 1975).
Une denrée de "secours" que nous ne cessons de leur retirer pour satisfaire des besoins induits par les économistes industriels.
En Europe, en 2012, près de 80% des subventions ont profité au modèle de pêche le plus destructeur de ressources, le plus consommateur d’énergie et le moins productif.
La surpêche en plus de contribuer à la famine dans certaine partie du monde, contribue à la destruction de l’environnement aquatique.
Celui qui n’est jamais monté sur un chalutier n’imagine pas la masse de poissons, de crustacés et de petits requins sans vie mis de côté sur le pont pour être ensuite rejetés par-dessus bord.
Pour trois poissons pêchés, deux sont rejetés sans vie à la mer. En 2012, le chalut, l’engin le plus utilisé dans le monde sous l’impulsion du marché et des subventions, était responsable à lui seul de 72% de ces rejets.
Ces rejets répétitifs s’ajoutent aux milliards d’objets plastiques qui détruisent la vie aquatique, qui s’ajoute aux millions de corps en décomposition, qui s’ajoute vestiges sous-marins des conflits mondiaux, qui s’ajoute aux saloperies de l’industrie pharmaceutique déversées dans les fleuves, qui s’ajoute aux engrais et autres pesticides rejetés dans ces mêmes fleuves, qui s’ajoute aux rejets sauvages de la pétrochimie ou les catastrophes maritimes, qui s’ajoute aux déchets radioactifs qui ne finiront jamais de mourir dans le fond de nos océans.
Depuis des siècles, l’humain prend ses cours d’eau, ses mers et océans pour la poubelle du monde.

Un Res omnis est, ce que les Romains appelaient, un bien qui appartient à tous.
Le contenu des mers et océans appartient à tous. Ce qui sort de la Terre appartient à tous. La Terre appartient à l’Humanité dans sa définition de famille humaine et non pas à une portion d’humanité qui veut privatiser ce qu’elle ne peut créer et ainsi contrôler l’accès aux ressources que la Vie elle-même a généreusement mise à notre disposition.
Nous sommes devenus, nous humains, au fil des siècles une force géologique qui ne tient plus compte des Lois de la Nature. Affranchis des contraintes qui nous liaient à notre Terre, nous nous sommes dé-solidarisés des autres représentants de cette ‘’famille humaine’’ pour imposer avec arrogance et mépris, envers les plus fragiles et les moins chanceux, la définition de l’Humanité dans ce qu’elle a de supérieur dans l’aboutissement de son développement, voire d’absolu.
Ainsi nous nous sommes également déresponsabilisés du sort de milliards d’individus, membres à part entière de la famille Humaine.
Nous avons tant bafoué leur droit à l’égalité, qu’aujourd’hui l’Equité s’impose comme un devoir.

Pour le salut de nos descendants, pour notre biosphère et pour la pérennisation de la famille Humaine, nous avons besoin que la vieille génération actuelle re-prenne conscience de sa vulnérabilité afin de permettre à la première génération qui nous remplacera de ne pas voir son destin lui échapper.

Qui peut prétendre vivre en paix et aspirer à la liberté en s’accommodant de la combinaison des catastrophes humaines et des catastrophes environnementales ; ou tant que certaines personnes ne seront pas considérées avec la même valeur que d’autres hommes ou femmes sur terre ?
Humilité, modération et solidarité. Trois mots clés pour permettre à la famille Humaine de s’élever avec dignité pour suivre, en toute conscience, le chemin de la Création.

Nemo.

A lire : Manière de voir N° 142, Ce que manger veut dire. Qui a servit de fil rouge à ces quelques lignes.

dimanche 9 août 2015

Les champs de la misère

L’élevage se pratiquait en fonction de la nourriture disponible sur place. Les pâturages faisaient l’objet d’une attention particulière pour protéger la régénération de la prairie du piétinement des ruminants et empêcher la concentration des déjections, qui affecte la qualité des sols et de l’eau. Un élevage fermier était conduit en symbiose avec la culture céréalière et maraîchère : les résidus de récoltes enrichis de pois, de lupins et de féveroles constituaient un fourrage sain et équilibré ; la paille fournissait la litière des animaux ; le fumier obtenu fertilisait les sols. La boucle était bouclée.
[Agnès Stienne, Le coût de la viande bon marché, avril 2013.]

Aujourd’hui l’animal est devenu une matière première. Les croisements et sélections génétiques produisent des bestiaux monstrueux. L’industrie de la viande s’accapare 78% des terres agricoles de la planète pour nous offrir les meilleurs morceaux de la vache en forme de steak de ‘’bœuf’’, tandis que le reste des abats, les parties moins ‘’nobles’’, sont reconverties en minerai de bœuf pour garnir de ‘’viande’’ les plats préparés que l’on réchauffent au micro-ondes, ou les lasagnes, les pizzas et j’en passe.
Fruits et légumes sillonnent les routes du vieux continent pour finir sur nos étals (quand ils ne viennent pas de plus loin) tandis que les OGM envahissent tranquillement les champs.
Les tomates de Lidl, par exemple, son produites en Espagne et ramassées par des employés agricoles marocains qui gagnent 33 euros par jour travaillé (huit à dix heures de travail journalier).

Tout ça parce que nous ne voulons plus connaître des périodes de famines dans notre civilisation soit disant développée ; parce que nous voulons pouvoir manger de tout à n’importe quel moment de l’année sans avoir à tenir compte des rythmes saisonniers de la Nature.
Ce qui ferait, qu’à l’heure actuelle, il y aurait deux fois plus d’obèses que de malnutris dans le monde.

Le recours aux congélateurs des grands distributeurs de l’agroalimentaire a fait baisser la part de budget qu’un ménage français consacre à l’alimentation de 40,8% en 1958 à 20,4% en 2013 (en Suisse on dépense une petite quinzaine de pourcent de notre revenu mensuel pour l’alimentation). Et ¾ des Français achètent leurs aliments via la grande distribution.
Une grande distribution qui ne favorise pas les producteurs locaux ou régionaux. Loin de là.
L'homme qui se lève tout les matins pour cultiver et entretenir les matières premières qui serviront à notre alimentation quotidienne n'est qu'un fantôme dans notre esprit, une personne que nous ne verrons peut-être jamais de son vivant, un nom sur une étiquette. Et encore...

Je parlais des paysans Suisses qui, noyés sous des tonnes de tracasseries administratives pour mériter un label quelconque, n'ont pas le temps de se montrer devant les caméras des télévisions.
D’ailleurs, il n’y a pas si longtemps, les agriculteurs français ont pris la route pour manifester leur mécontentement. Ils demandaient que leur labeur soit mieux reconnu et surtout mieux rémunéré alors que tous les intermédiaires, entre la ferme jusqu’à la grande distribution, s’en foutent plein les fouilles.
En gros ils veulent pouvoir vendre leurs produits plus chers. Ce à quoi répondit le gouvernement, l’esprit peut-être encore du côté d’Athènes : Ok, on va vous aider à payer vos dettes. ( ?!? )
Ayant fini par comprendre la revendication, Hollande a demandé que tous les intermédiaires revoient leur copie pour une meilleure redistribution des ‘’bénéfices’’.
[Et petite dédicace à cette agriculteur breton qui, pour passer sur la RTS, a mis sa casquette blanche « Le Gruyère Switzerland.»]
En Suisse, les agriculteurs n’ont pas vraiment cette chance. Déjà, ils n’ont pas le droit de manifester, tandis que le politique se demande bien se qu’ils font encore dans le paysage économique national :
« Heureux pays où les gens n’ont pas faim et où l’agriculture est presque de trop ! »
disait André Bugnon, Conseiller national UDC, il y a plus de deux ans.

Dernièrement, se fut au tour des producteurs laitiers d’être à nouveau dans le collimateur des centrales de distributions. Encore et encore. Parce que la lutte de l’exploitant agricole contre l’intermédiaire qui ‘’achète’’ le fruit de son travail ne date pas d’hier.
Elle a commencé en 1913, quand la guerre du lait a éclaté entre la société fabrique de lait condensé Nestlé- Anglo-Swiss et l’Union centrale des producteurs de lait suisses. Nestlé, qui au début mai 1913 payait les 100 kilos de lait (environ 97 litres) 20 fr 60, baissa son offre à 16 francs. Ce qui mettait le litre de lait à un peu plus de 16 centimes le litre.

Il y a sur le site fédéral, admin.ch, un calculateur de l’Office Fédéral de la Statistique qui nous calcule le renchérissement de la life. Grâce à ce petit outil on peut savoir que les 16 francs de 1914 ‘’valent’’ aujourd’hui 147 francs. Soit une variation positive de 819.6 % en un siècle. Ce qui mettrait le litre de lait acheté au producteur aux alentours 1 francs 50.
Là vous me direz que la ‘’Règle de trois’’ n’est valable que sur les bancs d’écoles. Parce qu’après, pour des calculs plus ‘’économiques’’, il faut y inclure l’âge du PDG de la Société qui rachète le lait, multiplié par son chiffre ‘’porte-bonheur’’, le tout pondéré par le nombre d’actionnaires auxquels on additionne le pourcentage qu’ils veulent se mettre dans les poches tout en restant assis. Et vous soustrayez ‘’Un’’ pour le fun.

A l’heure actuelle, on parlerait de le ramener à 48 centimes le litre de lait, alors que le prix payé aux producteurs tourne autour des 57 centimes le litre. Soit 3,5 fois plus qu’en 1913 !
Et ce pour des raisons qui n’ont rien à voir avec le labeur du producteur.
Pour faire baisser le prix du lait, on nous a parlé du prix du fromage ou de la frénésie des Chinois pour nos yaourts ; on a mis en avant les difficultés de la filiale du beurre à exporter ses produits ou à vendre ses produits en interne, alors que la Suisse importe des tonnes de beurre.
L’explication d’une baisse entraînée par les fluctuations des ventes des produits laitiers pouvait, à la limite, s’expliquer par le fait que sur le presque 4,2 milliards de litres de lait trait annuellement au pis des vaches, 500 millions sont bus. Le reste part dans les filières du beurre, des yaourts, des fromages ou dans le ruisseau voisin.
[Une vache donne 25 litre par jour, 300 x par an. En Suisse, en 2012, le cheptel était estimé à 555'000 têtes.]

Aujourd’hui, pour justifier la baisse du prix d’achat au producteur, Cremo nous parle du prix mondial du lait qui tire le prix national vers le bas. En France, par exemple, l’exploitant agricole n’aura pas plus de 34 centimes d’Euro par litre de lait. La Suisse ne fait pas partie de l’Europe économique, mais c’est comme si nous étions en plein TAFTA-TTIP.
Bref, la vache a beau jouer au foot ou gravir le Cervin, elle n’aura pas la même "reconnaissance" que la petite marmotte qui emballait le chocolat, et sa carcasse, une fois morte, se vendra aux alentours de 5,40 frs/ kg.
Je vous laisse faire le tour des rayons ‘’Boucherie’’ pour voir à combien on nous re-vend le steak de bœuf.

Autre produit de la terre. Autre liquide...
Au premier juillet de cette année est entrée en vigueur la nouvelle loi sur les auberges et débits de boissons.
Une loi modifiée et de nouvelles mesures pour tenter de faire baisser la consommation d’alcool (bitures express) chez les ados. Interdiction de vente à l’emporter d’alcool après 21 Heures (contre 22H auparavant).
Les buveurs de bières en font aussi les frais avec de nouvelles restrictions qui cette fois concernent également leur boisson préférée, tandis que les vignerons, qui pleuraient dans le gilet des parlementaires vaudois sur les invendus AOC qui traînaient dans leur cave, ont obtenu un ‘’passe droit’’.
Disons plutôt que les fins palais qui ont jeté leur dévolu sur le produit de la vigne n’ont pas de restrictions pour accéder au mythologique breuvage.
Y paraît, selon un conseiller national socialiste dont je n’ai pas retenu le nom, qu’après cinq bières une personne de 70 kg met sa vie en danger. Moi, j’en connais un de 105 kg qui, après cinq ballons de République, n’a pas trouvé le trottoir très large quand il est rentré chez lui à pied.

Une autre mesure, qui a failli me faire mourir de rire, est celle qui dorénavant interdit les « Happy hours ».
Les "Heures joyeuses" sont celles qui font, qu’après avoir passé huit heures de la journée avec tes collègues au bureau, tu les retrouves au bar du coin pour siroter des boissons (légèrement) alcoolisées, en profitant de la promo ‘’Happy hours’’ qui permettait au barman de te vendre deux verres pour le prix d’un. Un peu comme l’opticien du coin qui ne te facture qu’un verre…
Donc deux verres au prix d’un, c’est terminé !

Et c’est là qu’il faut saluer l’exploit de celles et ceux qui révisent, écrivent et signent nos textes de lois, des politiciens qui ont bu leur verre de lait avant de débattre pour faire aussi fort, car il est désormais « possible de vendre un verre à moitié prix. »
Je vous rassure, ce n’est AB-SO-LU-MENT pas la même chose. Même si au final vous consommez deux verres et n’en payez qu’un seul.

M’est avis que cette promo touchera essentiellement le produit viticole, histoire de se montrer solidaire avec les vignerons du coin qui ont été forcé de déclasser leurs vins blancs AOC pour les vendre au prix du vin de table. Mais ne pleurons pas trop. Le Parlement leur a accordé 10 millions de francs en dédommagement…

On asphyxie les agriculteurs pour donner de l’air aux vignerons. S’en est à se demander quelles sont les priorités de nos élus ?!
Parce qu’un ‘’Kir royal’’ passera toujours mieux qu’un ‘’Lait grenadine’’ en apéro, je me demande si les agriculteurs n’auraient pas tout intérêt à se pencher sur une formule qui permettrait de faire de l’alcool de lait..?

Nemo.