mercredi 27 avril 2016

Sticker or not sticker

Comme à chaque meeting international de fouteballe, Panini envahit les kiosques et autres épiceries de ses petites vignettes autocollantes à l’effigie des stars du ballon rond qui caresseront le cuir, d’ici une petite cinquantaine de jours, en France.
Une France qui a vu son ‘’Etat d’urgence’’ prolongé ; qui commence à en avoir marre des ‘’Nuit debout’’, mais ne s’opposera pas aux regroupements de personnes dans les ‘’fans zones.’’
Question de motivation idéologique certainement. Ou alors, faire sponsoriser les premiers par Heineken ou Coca-Cola

Vous pourrez me trouver toutes les belles explications possibles ou imaginables pour tenter de prouver les belles valeurs sportives, socialisantes, réunificatrices, et parler de paix dans le monde grâce au foot. Vous pourriez aussi parler de ces mercredis après-midi, dans le hall d’un centre commercial, pour échanger les vignettes, alors qu’avant cela se faisait principalement dans la cour d’école…
Il n'empêche que ces réunions sportives internationales ne sont plus motivées que par l’appât du gain, les parts de marché et son cortège de bénéfices. Et elles traînent dans leur sillage une belle bande de rapaces.

Le marchand de bières organise des ‘’Foot-boat’’, le distributeur de soda se la fait ‘’Plus belle la vie’’ pour embellir le futur des diabétiques, les cameramen s’entraînent à faire des gros plans sur les pieds des joueurs pour satisfaire l’ego des équipementiers, la Française des jeux sort sa collection de billets à gratter et Panini remplit nos poubelles à deux balles de ses déchets pas très papier. Mais on s’en fout : Un match de foot avec son fils « ça n’a pas de prix. »

Donc, mon p’tit bonhomme a son official sticker album de l’UEFA Euro 2016 France. La Star Edition s’il vous plaît, comme tout bon businessman qui se respecte…
Et ses parents lui achètent les paquets de vignettes.
A 90 centimes dans quasiment tous les points de vente, Relay – les kiosk, nous les refourgue à 1 franc le paquet. Sans oublier l’album de 94 pages… !

94 pages pour présenter les 24 équipes qui participent à la compétition et tout ce qui gravite autour de cet Euro de football. Sommaire, présentation des six groupes, classement des nations selon leur nombre de victoire dans cette compétition, palmarès récapitulatif des 14 derniers tournois, légende explicative des différents symboles. Le tout en dix langues différentes.
Et l’encart « create your own sticker ! » Only in english… Bref.

Ce qui caractérise les sticker Panini, c’est que très vite les doublons arrivent. En un mois d’achats modérés on atteint un taux de ‘’vignettes à doubles’’ - voire à triple, flirtant avec les 50 %.  Même si l’album est prévu pour recevoir 800 vignettes autocollantes numérotées jusqu’à 680.
Panini aime les ‘’doubles.’’
Il y a donc 24 séries de stickers composés de cinq numéros ‘’lettrés.’’ (38a – 38b, 39a - 39b etc.)
Ces séries de cinq vignettes présentent le onze de base de l’équipe nationale. Plus 1 sticker, en taille normale, pour encenser la vedette du groupe.
Donc dans chaque équipe, il y a 11 joueurs que vous collerez deux fois et qui vous énerveront plusieurs fois quand le numéro de la vignette que vous tenez dans la main ne correspond pas à un emplacement vide.
24 équipes par 11 joueurs, cela fait 264 photos de joueurs à doubles ! Ils sont malins, chez Panini.
Et ce n’est pas tout.

La Migros veut elle aussi surfer sur la vague du foot. Du coup l’éditeur d’autocollants a spécialement conçu un album de trente deux pages pouvant recevoir 120 vignettes. Et depuis le mardi 19 avril dernier, pour chaque achat de 20 francs chez le distributeur orange, la gentille caissière donne un paquet contenant trois vignettes à coller dans l’album Swiss football stars.
Le onze de base helvétique - s’il en existe un, se retrouve dès lors à trois exemplaires.
Comme cela ne suffit pas, l’Euro 2016 se vend aussi en vignettes 3D !

Maintenant, si dans quelques jours vous êtes toujours à la recherche d’un Rooney, Lewandowski, Muller, Pogba, Evra, Buffon, Verratti, Marc Janko, Shkelzen Gashi, de l’équipe d’Espagne ou même de CR 7, piochez dans le 2016 official sticker album, estampillé FIFA 365. La collection autocollante qui regroupe « 500+ Top clubs’ world stars. »

26 grands clubs de football de la planète FIFA réunis dans une seule compilation avec, en promo vente et pour 1 franc de plus, le pack album et l’équipe du FC Bâle au grand complet.
Ce qui fait, pour celles – si, si, il y en a, et ceux qui sont à donf dans le foot, qu’en moins d’une année vous aurez collé presque autant de Breel Embolo que de Cristiano Ronaldo.
Le bon côté avec le FIFA 365, c’est que vous Aurier la photo de Karim, le banni, Benzema.

On peut lire, par endroit, que Panini aurait choisi de ne pas publier l’homme qui ne connaît pas les paroles de la Marseillaise.
A cela près que l’album de l’Euro 2016 a été édité en fonction des informations que le fabricant d’autocollants de Modène détenait fin janvier 2016. Et la dernière information fournie par la FFF et son Noël Le Graet de président à la mi-décembre 2015, était que : « Benzema n’est plus sélectionnable. »

On peut comprendre que Panini souhaite coller au plus près de la réalité footballistique en vendant ses petites vignettes. Ce serait con que l’album Star Edition propose des portraits de joueurs Français qui ne sont pas dans la liste des 23 sélectionnés.
Et là, tout innocemment, je pense à Mammadou Sakho...

Alors en espérant que la Nati fera plus 4 points dans Groepsfase – la phase de groupes, je souhaite un bel Euro à celles et ceux qui suivront la compétition de près ou de loin.
Et plein de courage aux autres qui devront supporter les cortèges débiles de klaxons.

F.V.

dimanche 24 avril 2016

Il y a 30 ans, Tchernobyl.

Enfant d'Ukraine, Olga Kurylenko (ex-James Bond girl) raconte, à qui s’y intéresse, comment sa grand-mère lui avait interdit "pendant des années" de "manger la peau des fruits et des légumes", qu'elle n'avait "pas le droit de se promener sous la pluie, de sentir l'eau sur [ses] cheveux". On lui disait qu'elle allait les perdre.
"La nature reprend ses droits même si le silence est total. On n'entend rien, pas d'oiseaux, puis tout à coup un troupeau de biches détale. Il y a toutes ces traces d'animaux qui habitent les maisons abandonnées. Un jour, je me suis approchée d'un chiot que je voulais ramener à l'hôtel mais on me l'a interdit à cause de la radioactivité. Quand on approche de l'herbe avec l'appareil qui mesure la radioactivité un son strident et terrifiant retentit. Autour du site même, il n'y a rien. Il sert uniquement de base pour les ouvriers qui réparent le sarcophage."
Le 26 avril 1968, au moment de l’accident, elle avait 6 ans.

Après une explosion, non-nucléaire, survenue dans la salle du réacteur N°4 de la centrale de Tchernobyl, le cœur de celui-ci fusionne. L’incendie qui s’en suivit expédia pendant plus d’une semaine des particules radioactives dans l’atmosphère, qu’Eole se chargea de répandre sur l’Europe au gré de ses humeurs.
Rassurons-nous : Aucunes retombées "dangereuses" n'ont pu être mesurées au sol.
Mais c’est quoi une dangereuse retombée radioactive ? Comment ferions-nous pour savoir que nous sommes, ou avons été irradié, que notre organisme a été envahi par un élément radioactif qui détruit nos cellules les unes après les autres ?
Nous n’en savons rien ! Alors nous devons accorder notre confiance à celles et ceux qui disent ‘’savoir’’, qui informent celles et ceux qui nous dirigent, et qui nous abreuvent de chiffres exprimant des valeurs mesurées dont nous ignorons tout. Dans l’air on mesure en Sievert – milli ou micro, et dans nos aliments on compte en Becquerel.
Sans oublier que l’on nous communique rarement le résultat de mesures effectuées région par région. Ils prennent l’ensemble des mesures, divisent le tout par le nombre de cantons ou au kilomètre carré pour nous donner une valeur moyenne qui, forcément, sera rassurante.
Et puis, de toute façon, la Nature nous irradie naturellement d’une certaine quantité. Alors un peu plus ou un peu moins, cela ne fait pas grande différence.

Maintenant, avec toutes les cochonneries que nous mangeons, buvons, fumons ou respirons, comment être sur que notre futur cancer est dû à de quelconques retombées radioactives, ou à la présence de résidus de tritium?
Vous imaginez une info consommateurs sur les bouteilles d'"Henniez" du genre: " Boire de l'eau  entraîne la stérilité, peut causer des troubles intestinaux, des maux de têtes, etc…" une liste d'effets secondaires aussi longue que les recommandations, made in USA, de tout ce qu'il ne faut pas mettre dans un four micro-ondes… Impossible. Par contre nous sommes avertis que: "Fumer, tue".
Mais que sont nos petits bobos potentiels face à la dramatique réalité Ukrainienne.

Depuis trente ans, les alentours de la centrale maudite sont abandonnés. N’entrent dans le périmètre mortel que ceux qui ont pour mission de démanteler le réacteur. Une mission commencée quelques semaines après l’accident et qui durera encore 20 ans. Si l’on trouve où stocker les déchets, matières et matériaux radioactifs ; si l’on trouve le financement nécessaire. Bref, si tout va bien.
Un sarcophage d'acier et de béton fut construit à la hâte (en six mois). Un tombeau qui laissât malgré tout filtrer des radiations, et dont l'intégrité "physique" fut mise à mal, secondes après secondes, par l'intensité de l'énergie qu'il tentait de contenir et les éléments naturels qui le harcelaient.
Si bien qu'il fut décidé de construire un dôme géant qui isolerait les ruines de la centrale du reste du monde (en théorie). Une voûte de 260 mètres de large, 150 de long et 105 mètres en hauteur pesant 20'000 tonnes et calculée pour résister 100 ans aux éléments destructeurs.
Un siècle de protection certainement calculé par les meilleurs scientifiques du moment.
26 ans plus tard, le dôme censé protéger l'Humanité des émissions radioactives n'était toujours pas fini de poser. Mais le sera-t-il un jour..?
http://www.arte.tv/fr/3806900,CmC=3835606.html

Avec le temps, le dôme est devenu une arche : l’arche de confinement de Tchernobyl. C’est beau, c’est poétique, c’est biblique.
Budget : Le coût total initial du projet avait été estimé à 840 millions d’euros. En 2016, il est passé à 2,9 milliards d’euros… En tenant compte de tous les travaux nécessaires à "l'assainissement" du site ?
Mais si cet accident aura encore des répercussions dans le quotidien des résidents de Pripiat dans l’Oblast de Kiev pendant de nombreuses années, il nous faut aussi garder une certaine reconnaissance pour celles et ceux qui ont sacrifié leur vie pour tenter de contenir, de ralentir, la propagation des létales émissions radioactives.

Svetlana Alexievitch a écrit un livre qui donne la parole aux irradiés – ingénieurs, paysans, citadins, soldats, liquidateurs -, les victimes d'un événement qui "n'a jamais existé avant".
["La supplication, Tchernobyl, chronique du monde après l'apocalypse", Jean-Claude Lattès, Paris, 1998]
Histoire de lire que, contrairement à ce que sous-entendaient certains observateurs occidentaux dans les médias, "ils" n'étaient pas forcément tous bourrés à la vodka devant les panneaux de contrôle de la centrale le jour de l'accident.
(En Pennsylvanie, les enquêteurs ont bien mis en cause l'obésité d'un opérateur dans l'accident de la centrale de Three Mile Island. (…) un opérateur particulièrement imposant qui a laissé son proéminent abdomen recouvrir les cadrans où s'affichaient des mesures importantes.")
http://www.dissident-media.org/infonucleaire/SV_n742_juillet1979.pdf

"Personne ne comprend d'où je suis revenu… Et il m'est impossible de le raconter! Je n'ai pas peur de la mort en elle-même, mais je ne sais pas comment je vais mourir. J'ai vu agoniser un ami, il a gonflé. Il est devenu énorme, comme un tonneau…
Et un voisin. Il était là-bas, lui aussi. Opérateur d'une grue, il est devenu noir comme du charbon et a rétréci jusqu'à la taille d'un enfant. (…)
Je conserve une coupure de journal à propos de l'opérateur Leonid Toptounov. Il était de service à la centrale cette nuit-là. C'est lui qui a appuyé sur le bouton de sécurité, quelques minutes avant l'accident. Mais le système n'a pas fonctionné. On l'a soigné à Moscou. Les médecins disaient: "Pour le sauver, il lui faudrait un nouveau corps." Il ne lui restait qu'un petit morceau de peau non irradié dans le dos. (…) L'intérieur du cercueil était bardé de feuilles de métal… Il est couvert d'un mètre et demi de blocs de béton, doublé de plomb. (…)
Nous sommes seuls. Nous sommes des étrangers. On ne nous enterre pas comme tout le monde, mais séparément, comme des visiteurs de l'espace."

800'000. C'est le nombre approximatif de "liquidateurs" qui se sont sacrifiés pour leur Nation, pour l'Europe, pour le Monde. Ceux qui ont refusé d'aller mourir prématurément, préférant rester auprès de leur famille, ont vu la honte s'abattre sur eux, et sont devenus des "traîtres". Mais qui s'en soucie encore, 30 ans plus tard?

F.V.

samedi 16 avril 2016

Tout travail mérite-t-il salaire?

"A force d'évaluer toutes choses et toutes gens à l'aune du rendement monétaire - que rapportez-vous aux actionnaires? -, il était fatal qu'on retournât un jour la question aux évaluateurs, mais posée d'un autre point de vue: que rapportez-vous à la société?

C'est à un tel renversement de perspective qu'invite une étude publiée en décembre 2009 sous l'égide de la New Economic Foundation.
Eilis Lawlor, Helen Kersley et Susan Steed, trois chercheuses britanniques, y abordent non sans malice la question des inégalités, en comparant la rémunération de certains métiers, sélectionnés aux deux extrémités de l'échelle des revenus, à la "valeur sociale" qu'engendre leur exercice.

Dans le cas d'un ouvrier du recyclage, payé 6,10 livres sterling de l'heure (environ 7 euros), les auteures estiment que "chaque livre dépensée en salaire générera 12 livres de valeur" pour l'ensemble de la collectivité. En revanche, "alors qu'ils perçoivent des rétributions comprises entre 500'000 et 10 millions de livres, les grands banquiers d'affaires détruisent 7 livres de valeur sociale pour chaque livre de valeur financière créée". Ainsi le bilan collectif des activités les mieux rétribuées s'avère-t-il parfois négatif, ce que suggérait déjà la tempête financière déchaînée depuis 2008...

Baptisée "retour social sur investissement", la méthode utilisée pour quantifier la valeur générée par un emploi prend la théorie économique standard à son propre piège. Les hauts salaires refléteraient l'apport des cadres supérieurs à l'entreprise. La pensée orthodoxe dit que notre utilité dérive de l'argent, soulignent les chercheuses. Plus on gagne, plus on est utile. Il s'ensuit de maximiser le bien-être collectif, il faut accroître le revenu total.

Pareille vision du monde conduit notamment à n'attribuer aucune valeur au travail domestique, très majoritairement dévolu aux femmes. Et à perdre de vue que le processus économique s'étend en deçà et au delà de l'échange monétaire. Car la production et la consommation de biens et de services provoquent des répercussions involontaires appelées "externalité", tantôt négatives, tantôt positives, immédiates ou différées: une voiture transporte mais pollue, un livre divertit et instruit.

On peut évaluer ces effets secondaires en chiffrant les coûts de la pollution et les bénéfices de l'instruction. Il en va de même pour les professions. Pour déterminer la contribution sociale nette d'un métier, expliquent Lawlor, Kersley et Steed, il faut tenir compte de ses impacts indirects sur l'économie, l'environnement, la société, etc.

Prenons un publicitaire. Son activité vise à accroître la consommation. Il en découle, d'un côté, une création d'emplois (dans le secteur de la publicité, mais aussi des usines, le commerce, les transports, les médias) et, de l'autre, un accroissement de l'endettement, de l'obésité, de la pollution, de l'usage d'énergies non renouvelables. Par une série de calculs ingénieux et parfois acrobatiques, les trois chercheuses évaluent chacun des bénéfices et coûts de la surconsommation imputable à la publicité. Ne reste plus qu'à les mettre en rapport: "Pour chaque livre sterling de valeur positive, 11,50 livres de valeur négatives sont générées."
En d'autres termes, les cadres du secteur publicitaire "détruisent une valeur de 11,50 livres à chaque fois qu'ils engendrent 1 livre de valeur".

La proportion s'inverse si l'on considère le travail d'un agent de nettoyage hospitalier. Pénible, invisible, peu considéré, mal payé et généralement sous-traité, il n'en contribue pas moins à la marche générale du système de santé et minimise le risque d'infections nosocomiales. S'appuyant notamment sur un article du British Medical Journal consacré aux bénéfices sanitaires induits par l'embauche d'un nettoyeur supplémentaire ainsi que sur les coûts des pathologies contractées dans les hôpitaux, les auteures estiment que "pour chaque livre sterling qu'elle absorbe en salaire, cette activité produit plus de 10 livres de valeur sociale". Et encore, précisent-elles, "il s'agit probablement d'une sous-estimation".

La méthode permet également d'établir que les milliers de grands banquiers de la City - "ceux qui touchent des bonus de plus de 1 million de livres" et dont "les opérations extrêmement risquées, opaques et complexes" ont "provoqué la crises financière, puis la récession" - détruisent sept fois plus de valeur qu'ils n'en créent, contrairement à l'employée de crèche qui, par l'éducation prodiguée aux enfants et le temps libéré pour les parents, rend à la société 9,43 fois ce qu'elle perçoit en salaire. Ces décimales comportent à l'évidence quelque chose de saugrenu. " Nous ne visions pas la précision en effectuant ces calculs, expliquent Lawlor, Kersley et Steed, certains aspects de la valeur nous ont probablement échappé. Il s'agissait d'attirer l'attention sur le problème." D'opposer la création de valeur pour la société à la création de valeur pour l'actionnaire; de suggérer le bouleversement d'un mode de rémunération qui valorise en les surpayant certaines des professions les plus nuisibles et, symétriquement, décourage des activités profitables au plus grand nombre. Non sans adresser, en passant, la facture de leurs ravages à trois des six métiers étudiés.

Hier encore justifiées au nom de l'"effet de percolation" ("trickledown theory") selon lequel la richesse des plus cossu profite à tous puisqu'elle finit par ruisseler sur le front des pauvres, les inégalités inquiètent jusqu'aux libéraux à mesure que leur accroissement dissipe les dernières illusions de la "mondialisation heureuse". Au Royaume-Uni, un rapport gouvernemental publié en janvier 2010 détaille l'anatomie d'une société durablement fracturée, où les 10% les plus riches possèdent 97 fois plus que les 10 % les plus pauvres.

Citée dans ce document, une étude de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) relève que, entre le milieu des années 1980 et le milieu des années 2000, les inégalités de revenus se sont creusées dans dix-neuf des vingt-quatre pays étudiés. Les coûts sanitaires et sociaux de cette dénivellation vertigineuse sont documentés. Mais, en dépit de la concordance des diagnostics, quel gouvernement osera prescrire les deux remèdes connus à ce jour: une fiscalité d'écrêtement des hauts revenus; une restriction du libre-échange pour relâcher la pression sur les bas salaires?
 
F.V.
 
Article écrit par Monsieur Pierre Rimbert ; paru dans Manière de voir N° 119, "Crise bancaire, le casse du siècle."

Trop de musique ?

Tout pour la musique...

L'autre jour, au détour d’un besoin naturel, qui m'envoya visiter les w.c. d'une aire d'autoroute quelconque, j'ai fait pipi avec Rihanna...
Elle était là. Dans cette pièce légèrement glauque, mal éclairée, aux phéromones chargées des souvenirs du voisin qui s’est accroupi sur la turque, Rihanna chantonnait son dernier tube.
Celui du clip dans lequel on devine l’ombre de ses aréoles sous un top ‘’juste ce qu’il faut’’ transparent ; le clip dans lequel elle nous montre qu’elle maîtrise avec aisance ses muscles fessiers...
Bref.

C’est que la musique, dès que l’on pose le pied dans un lieu public, est vraiment partout.
Café, tea-room, resto, boutique, supermarché, centre commercial, taxi – souvent, et même dans certain transport public.
Metro, boulot, bistrot, porno, dodo. 24/7, tout peut se faire accompagné d’un rythme saccadé, ennuyeux ou torride, sur une mélodie douce et lancinante.
MCM Top ou Pop, TVM3, Rouge TV, Deluxe Music, MTV Rock pop how i funk your mother et les innombrables chaînes musicales qui garnissent les bouquets des diffuseurs des télévisions par câble ou satellite. De la très commerciale NRJ à l’ancienne bimbo usée des Balkans, qui chante en play-back debout dans le studio de la chaîne nationale, il y en a pour tous les goûts.

Comme si cela ne suffisait pas, on nous rajoute des émissions de variétés à tour de bras.
Il y a, chaque année, une carrière artistique à encenser, un chanteur mort à célébrer, de nouveaux talents à dénicher, un air de famille à découvrir, tandis que Patrick Sebastien s’éclate quasi tous les week-end avec ses chansons semi-paillardes et que le Tribute to Alain Morisod fait son come-back.
Ajoutez à tout cela les innombrables stations FM, les concerts, les festivals, les téléchargements mobiles, les partages, I-Tunes, les lecteurs MP4 et j'en passe...
Musique d'ambiance, Buddha Barr, Incognito, un p'ti jazz-funky ou encore un piano-bar, en accompagnement d'un apéro, un cocktail, un dîner sympatico-romantique.
Un fond musical agréable et détendu qui nous accompagne vers un petit paradis de plaisir, ou nous aide à patienter parce que « tous [leurs] collaborateurs sont occupés… » C'est COOL...

La disco, le "Club" et tous les genres musicaux qui s'y affrontent et vous traînent vers quelque chose de plus "tribal". Le mélange "beat’n’light", dancefloor rasta hip-hop et rap qui nique tout, accompagnés de multiples "shots." Ou comment transformer un Club en enclos à saillies...
Profond pour la bête, mais superficiel pour l'homme.
Mais tant que la jeunesse aime ça, pourquoi devrions priver les jeunes mâles, post-acnéens en rut, de leurs boìtes "à culs", "à chattes", "à salopes" ou encore "à carne"...?
La palme revient quand même à se Kosovar qui, un soir que nous étions en boîte, est venu me demander, en pointant Anémone du menton: "C'est à toi, ça?"

Toute la psychologie masculine, résumée en quatre mots...!
« Ouaiiis. Les beaux jours reviennent. On va faire des grillades et se les bouffer de la barb’o’cul. »
Pauvres chèvres…
Mais les jeunes gazelles doivent apprécier de se faire traiter comme de vulgaires morceaux de steak que l'on retournent au fil de la cuisson... Sinon elles ne se vêtiraient pas en "push-up", "string" et autres moules-fesses, histoire de bien être dans le ‘’vibe’’ et d’allumer les gueux du coin.
Tout cela pour paraître et mettre en avant ce que l’on n’est pas, ou que l’on n’a pas.
"Dès qu'ils n'eurent plus aucun soutient, ses seins tombèrent, tel le corps d'un pendu...", avait dit Reuben (dans un film, soit).

Le mix Music and Lights, encore et toujours... Dans nos voitures, en station-service, au centre commercial, dans les boutiques de fringues.
Un bon "rythme" pour encourager à traîner dans les rayons, à squatter les cabines d'essayage et à dépenser votre fric.
Il est surprenant de voir le nombre de vêtements qui s'achètent avec Justin Minaj and Co dans les oreilles et qui ne seront portés qu'une seule fois (voire deux), et qui deviendront ringards, trop petits, mal ajustés, dans le silence du miroir de votre chambre...
Mais le Top de l'embrouille schizo revient à ceux qui ont eut la délicieuse idée d'installer des écrans plats sur les murs de leur boutique.
Schizo ? Parce que la musique entendue n’étant jamais celle du clip qui projeté.

Ce qui me fait penser que la vie moderne que l’on nous propose c’est du Mac Donald.
Assis au milieu d'une foule en mouvement perpétuel, vous avez du Keisha et le brouhaha ambiant dans l'oreille droite versus Foofighters de l'I-pod dans l'oreille gauche.
Votre attention visuelle alterne entre Kung-Fu Panda 2, le morceau de salade coincé dans les dents de votre pote d’en-face et les rembourrages adipeux des meufs qui passent.
Mais c'est vrai que pour réussir à bouffer une merde ruminée, compactée, réfrigérée, passée aux micro-ondes, et qui ne ressemblera jamais au produit affiché en photo, il faut être vachement distrait...
Le tout en répondant à la copine blonde qui n’a pas encore compris qu’elle n’a pas besoin de 14 messages pour écrire une phrase.

Do, ré, mi, ré, do, si, la, sol… C’est fou ce que l’on peut faire avec quelques notes de musiques.

Sans vouloir dénigrer le travail de nombreux artistes musiciens qui se donnent de la peine pour nous proposer des créations musicales intéressantes, écoutons-nous encore de la musique ?
Les œuvres de Haydn, Mozart ou Beethoven ne se résumaient pas à trois couplets, 10 refrains, une beat-box et quelques touches de synthé, le tout concentré en trois minutes quinze.
Ce qui fait qu’à notre moderne époque, nous devons entendre plus de "musique" en une journée, qu'un bourgeois du XIXe siècle ne pouvait en écouter en une année.
Ben oui. Salieri, Paganini, Verdi ou Brahms n'avaient pas le même rendement que Lady Gaga, Maître Gims ou Kendji.

Bon. Du coup, je vais voir si je trouve le dernier d’Anastacia et le premier d’Anne Sila…

Ji Ef, pour les intimes.

dimanche 3 avril 2016

Le vivant à notre mesure.

Depuis que la pensée intelligente a renvoyé l’instinct dans sa boue originelle l’homo, devenu ainsi sapiens, a laissé la folie conquérir son esprit.
D'abord par sa curiosité, l’observation des événements et sa volonté à les reproduire.
Puis l'étincelle dans son esprit qui le pousse à améliorer ses inventions.
De nos jours, il n’a plus besoin de taper sur des cailloux pour faire du feu, il contrôle le feu nucléaire.
L’homme, qui a pris le pouvoir sur cette terre, rêve de grandeur, de conquête et malheureusement de domination.
Le gibier est sorti de sa caverne et a découvert le monde qui l’entoure.

En fémur, en coudées, en pouces, en foulées, à dos de chameau, en méridien, en lieues, en lunes ou par satellites ; en fonctions trigonométriques, mathématiques ou autres, il a mesuré son monde.
Il l'a dessiné, cartographié, avant de se le réapproprier.

La superficie de notre planète dépasse les 510 millions de kilomètres carrés, dont 70% est recouverte par de l’eau. Une eau dont le volume est approximativement quantifiée.
Comme les océans distinguent les continents l’homme, qui veut être le vitruvianos, érige des lignes de fronts – l’origine de nos frontières, morcelle la terre en contrées, en régions, en territoires, en pays.

Les 30% de terres émergées à notre disposition sont devenues un vaste enchevêtrement de propriétés "privées." Des Etats nations qui comparent leurs possessions en kilomètres carrés, et qui les divisent en hectares au gré de leurs plans d’affectations.
Selon la base de données de la FAO, l’affectation des terres agricoles mondiales en 2012 ressemblait un peu à cela :
Sur les 4,81 milliards d’hectares disponibles sur la surface de notre globe, 3,4 servent aux pâturage, dont 0,85 sont des sols dégradés.
Les 1.41 milliards d’hectares restants, définis en terres arables, sont à partager entre les sols à fourrage (0.5) et ce qui reste de disponible pour l’alimentation humaine (0.91). Une part que l’humain concède à l’horticulture, aux agrocarburants, etc. Des chiffres qui, pour moi, ne signifient pas grand-chose.
Cependant il reste encore beaucoup de surfaces à utiliser. Une partie de ce solde étant à disposition des génies civils, des architectes, des immoculteurs et leurs bétonnières.
La caverne en loft et devenue un apparte trois pièces qui se mesurent en mètres carrés*. Comme nos balcons, nos terrasses, nos maisons et nos villas.

Tout en dominant la Terre, l’homme lève les yeux vers le ciel.
La peau d’orange qui nous sert d’atmosphère est répartie en diverses couches superposées dont les différentes altitudes sont connues. Les gaz qui constituent notre biosphère ont chacun leur dénomination particulière, et leur densité dans notre atmosphère est également calculée.
Nous savons que la circonférence de notre planète est supérieure à 40'000 kilomètres, et qu’au-delà de 10 kilomètres d’altitude, sans assistance respiratoire, nous mourrons. 10 kil, c’est rien !

L’homme qui a levé les yeux vers le ciel et l’espace se rend compte qu’à mesure que les puissants télescopes scrutent l’espace, plus les limites de celui-ci s’éloignent.
Les 40'000 kilomètres à parcourir pour faire le tour du globe deviennent humble face au 384'000 kilomètres qui nous séparent de notre satellite lunaire, et insignifiant depuis que la distance entre notre étoile solaire et la Terre est connue : Plus de 8,6 milliards de kilomètres, pour un astre 100 fois plus volumineux que notre planète.
Dans le vide de l’espace les distances se mesurent en année-lumière, puis en parsec.
Mais pour ramener  notre environnement stellaire à notre mesure, la lumière du soleil nous parvient en un peu plus de huit minutes.

La Vie se quantifie aussi.
Dès notre naissance nous sommes mesurés, pesés et notre espérance de vie ‘’à la naissance’’ est déjà estimée. Notre croissance est surveillée par un pédiatre qui doit faire en sorte que l’on reste sur ‘’la courbe de croissance’’ idéale. Notre taille se mesure d’abord en centimètres, et les deux premières années de notre existence se comptent en mois. Le nouveau-né devient enfant qui s’efface devant l’adolescent pour finir homme et vivre quelques décennies en découvrant qu’avant lui, il y a des siècles, d’autres hommes ont vécu.

Son espérance de vie se retrouve confrontée aux millénaires d’évolutions de son espèce, aux millions d’années passées depuis la formation de sa biosphère. Des millions qui deviennent  des milliards d’années quand il tente de situer la naissance de l’univers.
A cette échelle, notre temps de vie n’excède pas celui d’une bactérie.
Pourtant, les 365 jours calendaires, répartis en douze mois, qui garnissent nos agendas – aux 52 semaines numérotées, sont là pour nous montrer qu’une année peut être longue, le premier jour de l’an.
Une année qui se divise en saisons**, en mois, en semaines et en jours.

La vie c’est du temps et le temps se mesure également. Grâce à l’horloge qui est surtout là pour s’assurer que nous sommes tous synchronisés sur les événements qui nous sont imposés.
L’apprentissage scolaire se subdivise en périodes de X minutes.
Le milieu professionnel nous impose de mettre notre temps de vie en location selon un temps de travail hebdomadaire – divisé en cinq périodes égales – qui donnent un taux de travail en pourcent, pour une rémunération mensuelle, présentée et déclarée, en revenu annuel.
Un environnement professionnel qui veut de la croissance, de la rentabilité et améliorer un PIB quelconque. Des données capitales qui ne peuvent que s’exprimer par des chiffres. Contrairement au progrès.

Nos jours sont divisés en heures, en minutes et en secondes.
S’il en faut soixante pour faire une minute, la seconde se subdivise en dixièmes, en centièmes, voire en millièmes, lors de compétitions sportives durant lesquelles la vitesse de déplacement du sportif est primordiale.
La seconde a d’abord été définie selon un temps universel, puis par le temps de l’éphéméride de l’année tropique 1900. Elle correspondait aussi, un temps, à la période moyenne du battement du cœur d’un homme au repos. La seconde moderne se défini maintenant par rapport à une propriété de la matière (1).
Une ‘’propriété’’ qui a permis de construire une horloge atomique dont la précision ne la fera dériver que d’une seconde en 16 milliards d’années. Cette horloge atomique continuera d'être précise quand notre soleil aura englouti la Terre...

Notre espace de vie est mesuré. Notre travail, notre repos et nos loisirs sont chronométrés. Tout comme nos déplacements.
Nos achats sont pesés. Nous mangeons en grammes et buvons en décilitres – pour les plus modestes, la mesurette du sirop anti-tussif du petit est graduée en millilitres. Indice de masse corporel, apport journalier, taux de cholestérol - bon ou mauvais, pour bien se nourrir; les pour mille de l'éthylomètre, pour ne pas trop boire au volant et les litres/100 km de nos voitures, pour ne pas trop polluer.
Le bonus/malus de l'assurance, pour le fair-play urbain et les décibels pour ne pas déranger ses voisins.

Après avoir ramené à son échelle la démesure de son environnement et s’être autoproclamé créature supérieure sur la surface du globe, l’homme se mesure à lui-même et aux autres organismes vivants.
Michael Johnson a couru le 400 mètres en 43s18; Usain Bolt le 100 mètres en 9''58 et le 200 en 19''19.
Ce qui fait une pointe de vitesse de 33 km/h pour le premier et 37 km/h pour le second.
Juste assez rapide pour rattraper son chien, son chameau dans le désert, pour choper un mouton, un cochon ou encore un gardon.
Un loup peut courir à 40 km/h (mauvais pour nous) et tenir le rythme sur un marathon. Un lion peut atteindre les 80 km/h. Le Guépard dépasse les 100 km/h, et son accélération le propulse à 90 km/h en 3 secondes!
Pour ressentir cette sensation un bolide de 150'000 francs, avec 450 chevaux minimum, est nécessaire.
Et Michael Phelps n’échappera pas au requin.

Des supers-costauds de balaises s'affrontent dans tous pleins de disciplines sportives (officielles ou pas).
Leonid Taranenko, champion du monde poids lourds en haltérophilie, a soulevé 266 kg. Le gaillard, qui doit facilement peser 100 à 120 kilos, a soulever dans un effort, à se faire péter tous les vaisseaux capillaires, deux fois et demi son poids.
D’autres, au terme d’entraînements intensifs, balancent des pneus de tracteurs, tirent des camions à mains nues, etc.
Un gorille de 300 kilos soulève aisément une tonne, et une fourmi peut porter jusqu’à 50 x son poids.
Le scarabée rhinocéros pèse 0,25 grammes, ce qui ne l’empêche pas de soulever 212,5 gr de matière. 850 fois son poids ! Pour moi, cela ferait 85 tonnes. Captain America peut aller poser son costume.

La femme du coiffeur m'a dit un jour, l’œil humide: "Un bon taureau n'est jamais gros...". Coquine.
Un autre jour, une femme voulait échanger « des œufs contre une nuit d’amour. »
Soit. Ca dure combien de temps une nuit d’amour ?
Un lion peut s'accoupler jusqu'à 50 x en une journée; une simple odeur permet au taureau ou à un étalon de s'acquitter de leurs devoirs, et j'omettrais volontairement les singes Bonobos.
L'orgasme d'un cochon peut durer 30 minutes, et la baleine se soulage de 1'800 litres de spermes pendant l'acte sexuel. Ce qui fait, par une banale règle de trois, un petit peu plus d'un litre de petits têtards, poussés à l’exil par un accro (100 kilos) du fitness...
On est très loin du compte...
Certaines espèces produisent de la lumière, d'autres de l'électricité. L'homme brille par sa médiocrité, et  conscient de son impuissance il passe son temps à faire chier son voisin. Tandis qu’aucun fitness n'a encore branché ses appareils de muscus sur des accumulateurs d'énergie. Quel GÂCHIS...!

Plus terre-à-terre…
Tous nos actes sont chiffrés. Notre consommation d’électricité se mesure en kW ; la qualité de nos appareils de photos se compare en millions de pixels et la capacité de nos ordis en méga octets.
Le commun des mortel n’est pas ‘’conçu’’ pour gérer des informations, des données qui présentent des valeurs s’exprimant en millions de milliards.
Déjà, c’est quoi un milliard ? Un chiffre avec neuf zéros derrière.
Super. Mais qu’est-ce que cela représente pour nous, comment imaginer ce nombre ?

Un milliard pourrait être 1 franc, ou 1 euro, mis dans une boîte chaque seconde, 24/7, pendant 32 ans ; ou un salaire mensuel de 5'000 francs pendant 16'666 ans et 8 mois. En SMIC ? Je vous laisse calculer.
Les 12'095 milliards d’euros de dettes de l’UE ? Une ardoise répartie sur le dos des Européens s’élevant à 28'836.5 euros par tête. Deux Dacia Duster, sauf erreur.

Où nous renvoie la dette américaine de bientôt 20'000 milliards de dollars ?
En dollar/ seconde – à 31'557'000 sec/an, ce n’est pas loin de 640'000 ans. Un voyage qui nous dépose vers la fin du Pléistocène, à l’extinction des grands mammifères dans l’hémisphère nord. Nous serions les heureux témoins de l’éruption de Yellowstone. Impossible voyage.
Pour éponger la dette de leur pays, chaque citoyen américain devrait verser une fois 62'155.5 dollars. Ou 170 dollars par mois pendant une année.

Tous ces chiffres, ces montants, restent dans l’imaginaire, demeurent virtuels et finissent par nous donner le tournis. Alors je propose au Vaudois de la Riviera et du Chablais de visualiser une ‘’consommation.’’
En 2013, selon les chiffres de BP donnés en 2015, la consommation journalière de pétrole était à 91,243 millions de barils/jour.
Un baril contenant 159 litres (arrondi) de pétrole, la conso quotidienne d’or noir est donc de 14'507'637'000 litres – 14.5 milliards de litres !
Je pourrais vous faire le calcul annuel en multipliant par 365. Mais stop ! aux grands chiffres qui de toutes façons ne nous parlent pas. Cette consommation quotidienne de pétrole, ramenée à une dimension plus humaine, équivaut à un débit de liquide de 168 mètres cubes par seconde.

Le débit moyen du Rhône, quand il arrive dans le lac Léman – vers Villeneuve, étant de 165 m3/s, une promenade le long du fleuve, dans le Chablais vaudois, permet d’apprécier ce que cette mesure représente.

Nous pouvons sincèrement remercier ces hommes de sciences qui ont marqué de leur empreinte, et de leurs savoirs, les millénaires de notre développement en nous léguant les étalons nécessaires,  ampère ; volt ; pascal ; kelvin ; Celsius ; mole ; candela ; newton ; joule ; coulomb ; tesla ; becquerel ; sievert et j’en passe, des connaissances cumulées qui nous ont permis de comprendre, en partie, ‘’comment’’ les événements invisibles se produisent autour de nous , ‘’comment’’ notre monde est monde.

L’homme est devenu le ‘’maître’’ de la terre en ramenant la Réalité à une dimension humaine, sa dimension. Un réel que nous pourrions ‘’percevoir.’’
Le dommage pour nous est qu’à force de tout expliquer, notre esprit se ferme à l’impossible, à l’événement qui n’a pas d’explications scientifiques, ni logique.
Pourtant si nous ouvrons notre esprit à cet impossible, ne risquerions-nous pas de découvrir la vérité, ou une partie de celle-ci ?

Pour parler scientifiquement, cette vérité pourrait se trouver derrière le mur de Planck. Un mur infranchissable, érigé une infinitésimale fraction de seconde après la naissance de notre univers.
Une limite au-delà de laquelle toutes les lois universelles qui s’appliquent d’un bout à l’autre de notre immense univers ne fonctionnent plus ; une limite au-delà de laquelle notre science n’a plus cours.

Pour nous, humbles citoyens, c’est encore une information qui, soit ne nous sert à rien, soit nous permet de penser à une puissance supérieure. Une force inaccessible à toutes pensées rationnelles qui réunit toutes les dichotomies. Une Force qui a sorti du néant tout ce qui nous permet d’exister.
Pour les athées, au-delà du mur de Planck, c’est le sac de Mary Poppins.

L’homme peut tout faire pousser, tout transformer, tout construire ; il peut détourner des fleuves ou creuser au travers des montagnes, mais il ne peut que le faire qu’avec, ou à partir, de matériaux déjà à sa disposition.
Son arrogance nourrit son complexe prométhéen qui le rend incapable de créer ce qui n’existe pas et, pour le plus grand malheur de la femme, incapable de donner la vie.

Qu’à cela ne tienne. Ne pouvant matérialiser physiquement à partir du néant, l’homme créera des valeurs subjectives à partir du vide.
L’apparition du chiffre auquel s’ajoute un autre chiffre lui a permis, grâce au concept de nombre ainsi créé, de tout dénombrer, de tout mesurer, de tout quantifier avant d’expliquer, le monde observé, par des formules complexes composées de chiffres, puis de lettres.

Le ‘’chiffre’’, est mot d’origine arabe, qui avait comme définition : le vide.
Le ‘’chiffre’’ Sifr, devient sefero puis un zéfiro que les Italiens nous transmettrons comme : Zéro (2).
« Etre un chifre » au Moyen-âge, présentait une personne inutile et ignorante.
Le vide auquel s’ajoute un autre vide, devient une formule complexe qui veut expliquer la réalité.

Sauf qu’en ramenant tout à une échelle perceptible et compréhensible par une logique, en quelque sorte imposée à notre esprit, nous amputons la Réalité de sa source Divine, de sa ‘’magie’’, pour en faire un réel souvent tristounet.

F.V.

* 70 m2. C’est la surface habitable qu’avait chaque ouvrier égyptien pour y vivre avec sa famille à l’époque des grands chantiers de l’antiquité.

** Il y a trois cycles saisonniers différents : Les saisons calendaires, les saisons astronomiques et les saisons météorologiques. Les deux premiers cycles sont définis selon la date des équinoxes. Les saisons varient également selon notre emplacement sur l’hémisphère terrestre.

(1) La seconde est la durée de 9'192'631'770 périodes de la radiation correspondant à la transition entre les niveaux hyperfins F=3 et F=4 de l’état fondamental de l’atome de césium 133.

(2) Définition du zéro sur wikipédia.
Pour Alain Rey, dans son ouvrage : Le Voyage des mots, De l’Orient arabe et persan vers la langue française, le ‘Sifr’ arabe devient cifra en langue latine puis le chiffre français. La définition de ce « zéro qui sert à tout compter » sera complétée, ou contredite, par Robert Estienne qui fera venir, au XVIe siècle, le latin cifra de l’hébreu sefer, pour ‘’compter’’.