dimanche 28 octobre 2012

Choom Boy ou Mormon?


Une des préoccupations du monde, pour ce dernier trimestre de l’année 2012, est la prochaine élection présidentielle Outre-Atlantique.
Nous saurons prochainement qui sera l’homme étant défini comme le plus puissant de la planète; nous saurons quelle majorité du peuple Etats-Uniens l’aura emporté: Si le candidat sortant afro-américain à peine plus basané que feu Michael Jackson et ,entre autre, ancien travailleur social dans les ghettos de Chicago se voit offrir une seconde chance pour aller au bout de ses promesses, ou si le candidat pure souche ''Made in USA'', soutenu par le ''Tea Party'' et qui a fait fortune dans la finance spéculative se retrouve avec la possibilité de radicaliser son pays.
Pour les inconditionnels, les inféodés, les extrémistes, etc, l’affaire est déjà emballée. Par contre, pour un électorat peu habitué et motivé par la chose publique (jeunes, hispaniques, afros, les oubliés du néolibéralisme, et j’en passe…), mais qui s’était mobilisé en 2008, le choix qui se présente à eux pourrait se résumer entre: Pardonner à Obama d’avoir sacrifié sur l’autel du consensus politique ses promesses de campagne, ou de se voir renvoyer dans le caniveau par son successeur potentiel.
En gros, un peu comme dans tous les pays qui se prétendent démocratiquement civilisés.

Il est vrai que la majorité qui a suivi Monsieur Obama, il y a 4 ans, peut lui reprocher de ne pas avoir modifié la fiscalité des plus riches; que les mesures prises pour réformer le système financier n’ont pas vraiment secoué Wall Street; qu’il n’a pas supprimé les lois hostiles aux syndicats ni levé les entraves aux libertés publiques mises en place par son prédécesseur; que Guatanamo est toujours ouverte en retenant toujours indéfiniment et sans jugement des ''combattants ennemis''.
Il reste que le président démocrate est parvenu à offrir "une couverture santé à des millions de citoyens, mais [que]son nouveau système d’assurance-maladie a laissé la part belle aux lobbies médicaux", comme l’a fait remarquer Benoît Bréville dans son édito publié dans le Manière de voir N° 125 (Un rêve est passé), en cédant sur l’idée de la création d’un assureur public.
Le monde pourrait aussi lui reprocher de ne pas avoir serré la bride aux monstrueuses institutions bancaires au début de son mandat, quand ceux-ci avaient l’arrogance dans les chaussettes. Malheureusement, Goldmann Sachs, Citigroup, JPMorgan, UBS et Morgan Stanley figuraient sur la liste des vingt principaux donateurs de la campagne Obamancienne. Difficile dès lors, pour les démocrates, de servir l’intérêt public sans mécontenter les banquiers qui financent leur carrière.
Donc, et en guise de punition, un plan de sauvetage bancaire est adopté le 3 octobre 2008:
700 milliards de dollars pour éviter l’effondrement des marchés financiers;
en février 2009 (le 10), pour décharger les banques d’actifs « toxiques », le secteur financier bénéficie d’un nouveau plan de soutien de 2’000 milliards de dollars et Washington débloque (le 18) un fond de stabilisation de 75 milliards de dollars afin d’enrayer les saisies immobilière et de réaménager les prêts des ménages en difficulté;
le 23 mars 2009, M. Timothy Geithner (ministre des finances) présente un programme entre 500 et 1’000 milliards de dollars destiné à purger le secteur bancaire des actifs à risque.
En contrepartie, et après que les banques aient renoué avec les profits et les primes, Monsieur Obama annonce, le 14 janvier 2010, la mise en place d’une taxe pour qu’elles (les banques) remboursent jusqu’à 117 milliards de dollars aux contribuables américains.
Essayez de passer chez votre banquier pour lui proposer de rembourser entre 3 et 4,5% de la somme qu’il vous a prêté, et filmez la scène. Cela se classera dans le top 3 des meilleurs fous rires de l’année.

Mais peut-on vraiment en vouloir à Obama? Que pèse la personnalité d’un homme, face à la tyrannie d’un système, d’une structure?
Il est le président des Etats-Unis d’Amérique, mais pas forcément le président des 314 millions d’américains. Son succès de 2008 qui laissait présager la (re)naissance d’une Nation "instruite, curieuse des autres, soucieuse de droit international et de justice sociale" (encore B. Bréville), n’était dû qu’à un décompte favorable qui lui donnait un avantage de plus 8 millions de voix, équivalent à même pas 3% de la population des USA. Pas grand-chose en fin de compte.
Mais l’espoir et le changement étaient là, aux portes de la Maison-Blanche, portés par une montée en puissance des Démocrates. Une ascension qui ne dura que deux ans, avant que les Républicains ne renversent la vapeur, remportent les législatives de 2010, reprennent le contrôle de la Chambre des représentants et s’évertuent à bloquer toutes les propositions de M. Obama.

L’animosité envers l’actuel président américain est grande, et ses principaux rivaux sont prêts à tout pour que l’épisode Barck Obama ne soit qu’un malencontreux écart sur le chemin de l’hégémonie mondiale orchestrée par les Etats-Unis. Quitte à le traiter de "communiste".
Alors que la Droite américaine est responsable du chaos qui allait secouer la finance mondiale dès 2007, celle-ci parvient, à grands renforts de spots télévisés, de meetings, de propos fallacieux, etc, à faire de Barack Obama le bouc émissaire parfait d’une crise qu’il n’arrive pas à gérer aussi facilement qu’il le prévoyait; dans les régions défavorisées, blessées ou meurtries par les évènements que nous connaissons, et qui ont apporté leur soutien au candidat démocrate en 2008, tout est mis en œuvre pour décourager les populations locales de se rendre aux urnes (ouverture des bureaux de vote raccourcies, surenchère de tracasseries administratives…).
Des manigances que l’on retrouve dans quasiment toutes les campagnes électorales autour du globe, des magouilles qui irritent l’épiderme d’une communauté internationale bien pensante lorsqu’elles se produisent dans des pays en voie de développement ou en cours de bombardement.
Mais au final, il se peut que nous nous délections des tribulations des candidats présidentiables, surtout quand ceux-ci s’écharpent pour le titre d’homme le plus puissant de la planète, dans un pays ma foi mythique, ou presque, qui a fait naître dans beaucoup d’esprits les rêves les plus fous.
Sauf qu’au bout du compte, les Etats-Unis d’Amérique ne sont rien d’autre qu’un pays comme tous les autres, avec ses crises, ses chômeurs, ses cas sociaux, ses discriminations, ses maffias, etc, etc…, mais aussi avec la meilleure armée du monde. Technologiquement parlant, s’entend.
Une technologie qui permettra aux USA d’anéantir son ennemi à l’autre bout du Pacifique, et de participer activement à la libération d’une Europe déchirée par le fléau Nazi, avant d’imposer au monde, par le biais de sa politique étrangère, la vision de sa propre sécurité intérieure.

En plus d’être une marionnette entre les mains des principaux acteurs des marchés financiers, celui qui sera bientôt (ré)élu endossera pour 4 ans le costume du Pantingone de l’US Army. Et qu’il soit Républicain ou Démocrate, n’y changera pas grand chose. Peut-être un peu moins de maniabilité pour le second cité. Mais cela reste à prouver.

Et pour le reste du monde?
Le prix reçu par Monsieur Obama le 10 décembre 2009 à Oslo, n’aura en fait été qu’une récompense pour de beaux discours. Défendre la création d’un état Palestinien en présence du premier ministre Israélien, M. Netanyahou, n’a pas vraiment convaincu les Israéliens de mettre un terme à leurs colonisations ou fait cesser toutes velléités, de part et d’autre. Une fois son Nobel rangé dans le tiroir, les assassinats par drones ont pu reprendre de plus belle et voir leur nombre augmenter.
Les troupes devraient rentrer d’Afghanistan, mais le Pentagone serait entrain d’y installer un commandement régional (ce qui est inacceptable aux yeux des Talibans pour entamer des négociations de paix).
Le commandement régional est un truc inventé, inauguré et disséminé à travers le monde  par l’armée américaine: Une organisation autonome, des moyens techniques et opérationnels importants, et un commandant qui devient un chef régional chargé de veiller au bon déroulement de la politique étrangère de son pays, ainsi que de la défense des intérêts des USA; un commandant qui prend une influence qui dépasse rapidement celle de l’ambassadeur local.

A la fin de la deuxième guerre mondiale, nombreuse furent les familles américaines qui réclamaient le retour au pays des Boys, le processus fut ralenti, voire interrompu, par l’apparition des tensions avec le bloc communiste, cet ennemi de longue date.
Si l’Europe s’est libérée d’une doctrine hitlérienne, il n’est pas impossible que l’intervention américaine sur le Vieux-Continent fut, officieusement bien sur, motivée par la progression de l’armée de Staline en Europe de l’Est. Une progression qui amena l’armée Soviétique aux portes de l’Allemagne, aux portes de l’Europe occidentale.
Les USA se devaient de marquer leur présence. Les bases américaines commencent à fleurir. Puis le conflit "froid" s’exporte quelques temps en Extrême-Orient. L’US Army y essaime de nouvelles bases, avant de connaître la déconfiture que l’on sait et de laisser "tomber" momentanément cette partie du globe.
Du coup, et à l’aide d’une surenchère nucléaire qui plonge le monde dans une crise de paranoïa apocalyptique accompagnée par son délire sécuritaire, Washington estime prioritaire de sécuriser l’Europe d’une possible invasion Soviétique. Avec de nouvelles bases US à la clé, puis les fameux Commandements régionaux.
Le Pentagone, au fil de ces 6 à 7 dernières décennies, n’a eu de cesse de se trouver de nouveaux ennemis, de s’inventer de nouvelles menaces, que cela soit en Afrique, au Moyen-Orient, en Asie ou en Amérique du Sud, pour justifier son existence, ses budgets colossaux et la présence de son armée hors des frontières de son pays.

Au 30 juin 2010, l’US Army recensait 1’434’761 militaires, 770’569 civils travaillant au Département de la Défense. Quant au Complexe Militaire Industriel qui fournit l’US Army en matériel, il faisait travailler environ 550’000 salariés en 2003. On peut dire que plus de 2,7 millions d’américains oeuvrent officiellement, et contre rémunération, à la défense de leur nation.
A titre de comparaison, les trois principaux constructeurs automobiles US (Général Motors, Ford et Chrysler) fournissaient des emplois direct, et indirects, à 3 millions de salariés.
En 2009, sur les dix plus grosses entreprises de défense dans le monde, 7 étaient américaines et affichaient un revenu annuel cumulé de: 177,77 milliards de dollars;
En 2011, le Département de la Défense a acheté pour 374 milliards de dollars de matériels. Dont plus de 93% à ses fournisseurs nationaux.
Et en 2012, c’est 50 milliards de dollars d’armements qui sont partis à l‘étranger (officiellement);
Quant au budget 2013 du Pentagone, il avoisinera les 525 milliards de dollars. Grosso modo deux fois plus qu’en 2001.
Les choses ne vont pas changer de si tôt pour le monde…

Le fameux 10 décembre 2009, lors du discours qui accompagnait la remise du prix Nobel de la paix, M. Obama a évoqué la notion de "guerre juste" en ajoutant que:  "un mouvement non violent n’aurait jamais arrêté les armées de Hitler". Une pensée qui rejoint les écrits d’Ayn Rand, écrivain décrite comme étant une philosophe du Tea Party, lorsque celle-ci publie, en 1963, que: "Toute nation libre avait le droit d’envahir l’Allemagne nazie et, aujourd’hui, a le droit d’envahir la Russie soviétique, Cuba ou n’importe quel enclos d’esclaves." A condition que  "les conquérants établissent un système social libre, l’invasion d’un pays esclavagiste est moralement justifiée."
Vénérée par Ronald Reagan, Ayn Rand est l’auteure fétiche de Paul Ryan, candidat républicain à la vice-présidence cette année.
Trois ans après avoir reçu son prix Nobel, Monsieur Obama expliquait lors de son discours sur l’état de l’Union du 24 janvier 2012:
"Le mois dernier, je me suis rendu sur la base navale d’Andrews pour saluer le retour de nos derniers combattants en Irak. Le fruit de leur travail démontre le courage, l’abnégation et l’esprit d’équipe de nos forces armées. A un moment où trop nombreuses sont les institutions qui ont manqué à leur devoir, elles ont excédé nos attentes. Elles ne sont pas obsédées par les différences qui peuvent exister entre leurs membres. Elles se concentrent sur la mission à accomplir. Imaginez ce que nous pourrions accomplir si nous suivions leur exemple (…) Ceux d’entre nous qui ont été envoyés ici à Washington pour servir pourraient tirer une ou deux leçons du travail effectué par nos soldats. Quand vous mettez cet uniforme, le fait de savoir si vous êtes blanc ou noir, d’origine asiatique, latino-américaine ou indienne, conservateur ou progressiste, riche ou pauvre, hétéro ou homosexuel, ne compte pas. Quand vous allez au combat, vous veillez sur la personne qui se tient à côté de vous, sinon votre mission échouera. Quand vous vous trouvez au cœur de la bataille, c’est toute votre unité qui gagne ou qui perd, qui sert ensemble une nation qui ne laisse personne derrière elle. L’un des biens les plus précieux est le drapeau du commando de marines qui a tué Ben Laden (…) Leur mission n’a réussi que parce que chaque membre de cette unité s’appuyait sur les autres. Car il est impossible de prendre d’assaut un escalier, dans le noir et le danger, si vous ne savez pas que quelque un veille sur vous, et vous protège. Il en est ainsi de l’Amérique."
Propos rapporté par B. Bréville, qui fait remarqué que "Le président américain demeure, à ce jour, le seul lauréat (Nobel de la paix) rêvant d’une société organisée sur le modèle d’un commando de marines".
L’US Army comme modèle de référence…?
William Pfaff remet l’église au milieu du village dans un article écrit en 2008 "Base américaines sans frontières": "entre le début de la guerre froide et la guerre actuelle en Afghanistan, Washington n’a pas manqué d’occasions de faire tonner le canon: entre autres, guerre de Corée, guerre du Vietnam, intervention au Cambodge, opérations militaires au Liban, à la Grenade, au Panama, en république Dominicaine, au Salvador, au Nicaragua (indirectement), en Somalie, deux invasions en Irak, et une de l’Afghanistan. A l’exception de la première guerre du Golfe, aucune de ces expéditions ne s’est conclue par des résultats conformes aux objectifs affichés".

Pourtant cela n’empêche pas les généraux de croire que l’US Army est la première armée du globe et, aux politiciens qui la servent, de penser qu’ils peuvent imposer leurs idées au reste du monde. Peut-être est-ce vrai. Comme je l’ai déjà dit, l’armée des Etats-Unis est technologiquement supérieure aux autres forces armées. Pour le moment.
L’US Army a une capacité d’intervention très rapide, du fait de ses multiples bases disséminées dans des zones stratégiques. Une présence militaire qui n’est pas là uniquement pour la sécurité de l’Europe, malgré ce qu’elle continue à croire. Parce que si le Pentagone maintient ses troupes dans les pays producteurs de pétrole par exemple, c’est bel et bien pour garder le contrôle sur les ressources Européennes et sécuriser un site qui pourra servir les intérêts de l’Oncle Sam.
L’Amérique ne sert que les intérêts de l’Amérique, et ce, crise économique mondiale aidant, de manière de plus en plus marquée. Ce qui pourrait créer des restrictions budgétaires qui nous seraient défavorables.
Prenons bêtement l’OTAN. Les USA financent l’organisation à hauteur de 25% du budget de son fonctionnement, et fournissent la plus grande partie du matériel.
La France, qui se la pète sur le continent n’est présente que d’un tout petit 10% dans le bilan annuel, en ayant la possibilité de choisir ses engagements sur le terrain (si j‘ai bien tout saisi).
Du côté de Washington, les pressions se font de plus en plus fortes pour que les Européens assument eux-mêmes leur défense. Comme cela devait être le cas à la signature du traité en 1949.
Comme ni l’industrie militaire Française ou Allemande ne sont aptes, ou prêtes, à compenser le désengagement Américain qui s’annonce, la Maison-Blanche se propose de vendre son matériel de guerre aux membres de l’UE (histoire de s’assurer quelques rentrées d’argent supplémentaires) et de garder/gérer le contrôle des opérations quelque part dans un centre de commandement, à l’abri de toutes retombées néfastes aux yeux de l’opinion publique américaine.
L’exemple flagrant: l’intervention en Libye. Sarko a bandé comme un âne en voyant partir ses Rafales, tandis que les Awacs étaient bien loin des éventuels tirs de riposte.

Les Ricains ne vont pas nous planter là comme des malpropres, mais les deux derniers fiascos (Irak et Afghanistan) ont coûté cher à Washington, et au peuple Américain, qui malgré son astronomique budget ’’Défense’’ ne peut pas se permettre une nouvelle invasion (euh… au bol, en Syrie), comme ça, pour le fun d’être le gendarme du monde, alors que l’objectif affiché est le retour à l’autre bout du Pacifique, histoire de faire mumuse avec la nouvelle flotte de guerre Chinoise, et garder un œil grand ouvert sur le commerce maritime de l‘Empire Jaune.
Bref. Choom boy ou mormon en novembre, dans le colon en décembre.

Une petite dernière, pour se faire du mal…
En juin 2008, M. Barack Obama qui vient d’obtenir l’investiture des démocrates pour l’élection présidentielle, déclame devant ses supporters:
"Nous pourrons nous souvenir de ce jour et dire à nos enfants qu’alors nous avons commencé à fournir des soins aux malades et de bons emplois aux chômeurs; qu’alors la montée des océans a commencé à décroître et la planète à guérir; qu’alors nous avons mis fin à une guerre, assuré la sécurité de notre nation et restauré notre image de dernier espoir sur Terre."
Zéro pointé,man.

NEMo.
Merci aux journalistes du Monde diplomatique pour leur intense et riche contribution.

dimanche 21 octobre 2012

Je me dresse

Lu dans "Manière de voir" N° 123/  CHINE, état critique.
Quelques extraits de ''Fin ou commencement'', un poème de Bei Dao, homme meurtri par la Révolution culturelle chinoise.
Fondateur, avec d'autres écrivains, de la revue Jintian ("Aujourd'hui"), qui sera fermée en septembre 1980.
Alors à Berlin pendant les évènements de juin 1989, l'un de ses poèmes, Huida ("Réponse"), circule parmi les manifestants. Il ne pourra revenir dans son pays qu'en 2006.

Fin ou commencement
Je me dresse
à la place de celui qu'on vient d'assassiner
pour qu'à chaque lever de soleil
mon ombre solennelle traverse le pays tout entier

La brume endolorie
couvre la mosaïque des toits
Entre les maisons
les cheminées vomissent des êtres de cendre
La chaleur s'efface au faîte lumineux des arbres,
s'attarde au bout d'un mégot
De ces mains lasses s'élèvent, pesants, de sombres nuages

Les ténèbres
au nom du ciel,
pillent au grand jour.
L'Histoire de l'Orient est silence:
sur l'antique fresque murale
les peuples
vivent dans le silence, meurent dans le silence.

O ma terre
Tu ne chantes plus!
Les cordes des haleurs du fleuve Jaune,
cordes brisées de violon,
ne résonneraient donc plus?
Le sombre miroir du temps
se serait à jamais
détourné de toi ne laissant qu'étoiles
et nuages errants?

Je te cherche
de rêve en rêve
de nuit de brume en aube floue
Je cherche le printemps, je cherche les pommiers,
l'air que déplace l'abeille,
les marées sur le rivage,
les mouettes, lumière à la crête des vagues,
les légendes scellées dans la muraille, de toi, de moi, les deux noms, oubliés.

Si ce sang versé
pouvait te fertiliser
sur les branches demain
les fruits mûrs auraient ma couleur.
Oui: je l'avoue:
dans la lumière blanche et figée de la mort
je tremble.

Qui voudrait être météorite,
qui voudrait être statue,
statue glacée de ceux que l'infortune a frappés,
alors que le feu éternel de la jeunesse
circule d'une main à l'autre, qui?
Quand les pigeons viendront se poser sur mon épaule
je ne sentirai ni leur souffle ni la chaleur de leur corps.
Après avoir lissé leurs plumes ils s'envoleront d'un coup d'aile.

Comme tout être humain
j'ai besoin d'amour.
Je voudrais dans les yeux de mon amour
goûter la paix de chaque soir.
Je voudrais attendre le premier cri de l'enfant
près du berceau qui se balance.
Je voudrais sur l'herbe, sur les feuilles tombées,
sur chaque regard sincère
écrire le poème de la vie.
Ces désirs les plus communs font tout le prix de l'Homme.

Si dans ma vie
j'ai menti tant de fois
je suis resté fidèle
à un serment d'enfant.
Le monde,
en divorce avec l'âme enfantine,
ne m'a jamais pardonné cela.

Je me dresse
à la place de celui qu'on vient d'assassiner.
Je n'ai pas d'autre choix.
Là où je tomberai
Un autre se lèvera.
Sur mes épaules passe le vent, le vent tout scintillant d'étoiles.

Un jour
le soleil deviendra
cette couronne fanée
sur chaque combattant
qui refuse de se soumettre
Devant la forêt de tombes
les corbeaux, ces fragments de la nuit,
en nuages s'envolent.

Traduction de Chantal Chen-Andro
N.

Trois petits plus


Un plus de Be Yo.
Dans la fameuse pub patriotico-écologique, en version rap, financée par le grand distributeur de produits en tous genres qu’est la Coop, et destinée à tous les télévores Helvétiques zappant frénétiquement, nous découvrons trois mecs qui aiment leur tracteur, qui trouvent que leur vache est la plus belle et qui sont heureux de faire caca dans la cabane au fond du jardin.
Ces trois biomen sont accompagnés d’une blondie qui se tortille et se baigne dans un jacuzzi de fleurs des champs de la montagnes, tandis que l’un d’eux taille, à la faux, un joli petit cœur dans le champ voisin.
« Pour une bonne santé, naturalmente. »
Ca c’est pour la télé.
A l’arrivée, au rayon fruits et légumes du magasin qui vend (un peu) de ce qui se cultive en Suisse, et sous les jolies affiches vertes représentant le fameux cœur taillé plus haut, la Coop nous offre un cour, réactualisé, de géographie contemporaine.
Disposé sur chaque rayon, ou presque, une large étiquette présente un carré blanc sur fond bien vert; dans le carré est dessiné la Suisse et un point rouge localise la provenance de l’aliment à consommer.
Le ‘’Je viens d’ici’’ annoncé concernant la Romandie. Une Romandie qui se situerait, en cherchant la provenance de certains fruits sur leurs emballages, soit en Espagne ou en Italie.
Rassurez-vous… on trouve quand même des aliments qui proviennent de notre belle région détaxée…
Après la Suisse château d’eau de l’Europe, la Romandie maraîcher de l’UE?

Plus de gaspi.
Il y a grosso modo une année, le 13 novembre 2011, un média local faisait un état mondial de la quantité de nourriture qui finissait à la poubelle (250’000 tonnes/an rien qu’en Suisse).
[Après nous avons eu droit à une polémique sur les dates de péremption, des articles sur les épiceries du cœur qui distribuent une partie des invendus des grands distributeurs, des articles sur le nombres de personnes pauvres vivant dans notre beau pays. Ensuite viendra l’hivers avec ses SDF et les ’’Restos du Cœur’’… Non pas que je sois contre tout cela, mais la solidarité devient une entreprise qui décharge les gouvernements de leur responsabilité envers les démunis et enchantent ceux de Droite qui y voient (peut-être) un moyen de faire un peu plus de blé.]
Le 18 octobre de cette année le même média que celui qui n‘est pas cité quelques lignes plus haut, mais dans sa version hebdomadaire, rouvre le moloch et nous apprend, par sa manchette, que chaque ménage Suisse mettrait, en moyenne et annuellement, 2’000 francs de bouffe à la poubelle.
Ca fait quand même beaucoup, et peut-être qu’en présentant la chose du point de vue du porte-monnaie cela encouragera les consommateurs à plus de retenue avec le sac Pavag. Des sacs poubelles qui seront bientôt taxés, d‘ailleurs.
Du coup je me dis que pour chaque ménage qui se serre la ceinture à chaque fin de mois, et qui recycle les épluchures de pomme-de-terres en chips de fabrication artisanales, il y a de l’autre côté un goret qui balance pour 4’000 francs de nourriture au fond du container.
Par curiosité, j’ai posé la question à une gérante Denner (magasin d’alimentation modeste qui doit bien avoir le volume d’un Marché U): Quel montant de nourriture finissait mensuellement aux incinérables (Denner ne recyclant que le PET)?
Sa réponse: environ 1’000 francs. Une bonne moitié concernant les produits ’’data’’ ou pourris, le reste étant dû soit à la distraction des clients (bouteilles, yaourts, emballages, etc maladroitement cassés), soit à la connerie d’autres clients (couvercle de yaourts percés volontairement, aliments à moitié consommés et remis dans les rayons, etc).
A 12’000 francs/an de produits alimentaires jetés, pour un magasin bien géré, et plus de 760 succursales, on friserait le million d’invendus alimentaires.
Les chiffres pour Coop, Migros ou Manor sont bien sur introuvables, ou noyés dans les frais de recyclages. Par exemple, les frais de recyclage des invendus pour la Coop, en version ’’Romandie’’, se monteraient à: 2’500’000 francs/an.
Bref ça gaspille à tout va.
Reprenons nos 2’000 francs de bouffe, ajoutons un fumeur modéré par ménage qui volatilise un paquet de clopes par jour, soit 2’810 francs et des cendres/an; Un papa accroc à la loterie Suisse à numéro: 624 francs; Une maman qui ferait l’euromillion: 962 francs; Le passage au MacDo après les commissions du samedi: 2’600 francs; La Playstation en doublon de la Wii, la deuxième TV, le quatrième natel, le second ordinateur qui ne sert plus vraiment depuis le iPhone 5, les vêtements mono usages, les achats compulsifs, les abonnements des journaux que l’on ne lit plus, les gadgets pour la voiture, etc qui n'en finit pas…
Nous sommes des millionnaires qui s’ignorent. J’déconne. Il faut bien vivre un peu et savoir se faire des petits plaisirs. Reste à savoir si ouvrir son crapaud procure réellement du plaisir…?

Du ''Plus'' en surplus.
Récemment j’ai appris que la radio numérique existait depuis dix ans déjà. Ah bon…? Cela ne fait pas dix ans que la RTS (Radio Télévision Suisse) nous bassine avec ses pubs pour les récepteurs DAB.
‘’Passez au numérique pour une meilleure qualité blablabla’’.
Il y a une quinzaine de jours la RTS (encore) informait ses auditeurs que dans 2 à 3 ans tout le monde devra avoir un récepteur DAB plus (pour une qualité encore meilleure,,,), et que les années de la ''FM'' étaient comptées (fin de la FM en Suisse aux alentours de 2020).
Les opérateurs de téléphonie s’apprêtent à lancer la 4G, mais en attendant les abonnés ’’Orange’’ ou ‘’SFR’’ doivent se contenter de la 3G plus plus.
C’est fou cette tendance à mettre des ’’plus’’ partout. Les garagistes, les assureurs, l’hôtellerie, la restauration, chaque prestataire de service propose une formule ’’Plus’’. Même nos pharmaciens s‘y mettent. Ou alors y aurait-il dans chaque entreprise une agence de notation?
Présentation du personnel et tenue des locaux: AA+;
Visibilité et choix des produits: AA;
Connaissances générales du personnel: AB+;
Humour du patron: BBA
Choix de sortie du personnel: BBQ
Crédibilité de Montebourg & Co: CCC
Mobbing et Burn out chez France Télécom: AAA.

Que d'énergies dépensées pour améliorer le standart du pauvre, non?

NEMo.