jeudi 22 août 2013

Last week

La dernière semaine de vacances s’achève, laissant derrière nous les cadavres des tubes d’écran solaire, les stocks de canettes de bière vides et d’emballages de viandes à grillades ; les souvenirs de la dernière tentative de noyade en sautant dans l’eau après s’être assommé de ‘’blondes’’ au soleil, les souvenirs de l’ultime soirée avec la cousine du pote avant qu’elle ne reparte dans son pays loin là-bas.
Dernier espoir : Envoie  « COCU au 71777 » pour savoir si ton copain a envoyé « NEXT au 74567 » pour savoir quand commencera sa nouvelle liaison avec cette taspé de cousine.
Fini les belles vacances bien méritées après un début d’année plus qu’humide, après une météo printanière déprimante dont on n’a cessé de mesurer l’impact économique pour le commerce en général. Pour l’impact écologique sur notre bon vieux caillou, faut attendre.
Un bel été qui a mis un petit quart sud-ouest de la France en restrictions d’eau alors que, presque à l’autre bout des terres, le fleuve Amour déborde vers la frontière Sino-Russe et, beaucoup plus bas, Manille écope en 48 heures l’équivalent de la moitié des précipitations annuelles sur Paris (env. 300 litres au mètre carré), résultat du passage d’une tempête tropicale en période de mousson.

Il arrive que les quelques minutes du bulletin météo, diffusé sur M6, débutent par « l’image du jour ». Un glissement de terrain, une inondation, une tempête exotiquement tropicale (Manille) ou autre déchaînement naturel. Il arrive aussi parfois, dès qu’il y a des morts, que les grosses colères de la Nature fassent le premier titre des journaux télévisés. Les avants dernières bonnes nouvelles de l’été.
Le mardi 20 août, sur M6, le premier titre parlait d’une fusillade à Marseille, classifiée en « règlement de compte » avec tout le déballement politico-médiatique  s’y rattachant.
«  Le treizième règlement de compte dans la cité phocéenne depuis le début de l’année », l’envoi de renforts policiers dans une ville où la guerre des gangs menace la sécurité des citoyens, cela ne se rate pas. Surtout dans une région où les « agressions sur personnes ont baissé de 13% en un an ».
Après cela ça parle de la « menace terroriste » inexistante, de bavure policière, d’exploit médical, de rentrée scolaire, des photos d’un petit chiard royal et enfin de l’ « Overshoot Day ».

L’OD, c’est quand nous avons épuisé les ressources naturelles que notre bonne vieille Terre renouvelle annuellement, et que nous aurions dû bouffer en une année.
Au vu du remplissage des rayons dans tous les supermarchés du monde civilisé, c'est une date plus qu’abstraite à partir de laquelle nous consommons nos réserves et empiétons sur la ‘’production’’ de l’année suivante.
Une date qui marque le début de notre dette écologique et alimentaire envers Gaïa ; une dette dont nous ne nous acquitterons jamais, bien entendu.
Une date, qui selon les calculs et les dires de Greenpeace, est tombée ce 20 août 2013. En 1987 nous étions presque à l’heure, l’Overshoot Day était intervenu le 19 décembre.
Que de progrès réalisés en 26 ans…

Moins global, plus local…
Quand ils ne laissent pas un wagon citerne de produits chimiques (vide heureusement) fuguer d’une gare valaisanne et finir sa course contre un butoir de sécurité en zone urbaine, les CFF continuent a percuter des véhicules ou a passer sur les gens qui tombent accidentellement, ou pas, sur les voies.
Les fameux « accident de personne ». Personne qui em… des milliers de voyageurs ; le classifié dans le 90 %  des « cas psychiatrique » dans la stat des suicidés. Le 10 % restant dénombrant la quantité de jeune, jusqu’à 25 ans, voulant voir si la vie de l’au-delà est meilleure qu’ici bas.
Dans nos belles contrées qui veulent cultiver l’égalité intégrale, force est de constater que jusque dans la mort, les inégalités sont hurlantes de discrimination.
Quand Roger se fait péter la tronche, ou prend le train en marche, personne n’en parle. C’est un cas psychiatrique. Par contre, quand le boss de l’opérateur national des télécommunications décide de se pendre, il a toutes les ‘’excuses’’ humaines des classes dirigeantes et politiques sur la difficulté de vivre dans un monde en éternelle compétition, éloigné de ses enfants.
« Un homme et un directeur général hors du commun » ;
« (…) nous l’admirions tous, nous l’aimions tous, à juste titre. L’homme dirigeait 17'000 salariés et réalisait un chiffre d’affaires de plus de 11 milliards de francs par an. »
A juste titre… Roger n’était peut-être qu’un laveur de carreaux au chômage qui venait de voir sa femme le quitter avec ses gosses. Mais surtout, Roger n’avait pas de villa pour se pendre et il ne réalisait pas 11 milliards par ans !
En fait, ce n’est pas le big boss qui réalise un C.A. de ‘’X’’ milliards annuellement. Ce sont les milliers d’employés soumis au stress concurrentiel qui, par leur professionnalisme et leur charisme, parviennent à nous convaincre que « Deutel » et meilleur qu’« Untel ». Et, finalement, ce sont bien les utilisateurs qui sortent leur argent de leur porte-monnaie pour gonfler le chiffre de l’opérateur.
Mais pas de violence, c’est la fin des vacances.

La rentrée c’est le retour de la concierge d’en face, revenue de ses terres lusitaniennes. Revenue avec son amour toujours débordant pour les enfants qui ne mangent pas le bacalà-haut… de la morue, quoi.
La rentrée c’est aussi le retour de mes chers voisins qui cultivent encore et toujours les appâts pour la pêche dans le local des containers du bâtiment (certains voisins, faut pas généraliser).
Le p’tit Nono, lui, ne veut pas entendre parler de l’école pour le 26 prochain mais insiste pour se faire payer un sac à dos deux fois trop gros à 189 francs chez Manor. Il n’aura pas ce sac…
Le Matin se demande où le canton va bien pouvoir caser 60'000 élèves de plus ? Et nous répond quelques jours plus tard : Dans les corridors des établissements scolaires. C’est con. A force de construire des logements d’un certain standing pour attirer les foules au crapaud aisé, nos chers élus oublient qu’un être humain ça se reproduit et quand ils veulent les crédits nécessaires pour construire une nouvelle école, cela passe mal dans le budget communal… Alors quand on a besoin de sousous, on emmerde les automobilistes. On augmente les différentes taxes, l’essence et on multiplie les parcmètres. Peut-être que dans 150'000 ans les nouveaux horodateurs installés en ville auront compensé l’impôt que Nestlé ne paie pas. Mais nous ne serons plus là pour le savoir, d’ici là.

La rentrée c’est l’occasion de revoir tous nos collègues de travail, les mêmes qui ont pu suivre, liker et commenter nos tribulations sur FB ; c’est l’occasion de retrouver nos chefs avec lesquels nous avions gardé un contact discret, au cas où, parce qu’ils nous l’avaient demandé… C’est aussi l’occasion de raconter les détails invisibles de ce qui n’a pas été posté et de comparer les bronzages, les bibelots et l’herpès génital.
La rentrée ce sera aussi la possibilité de contracter nos assureurs pour savoir si ils font la complémentaire chômage, comme vu à la télé, histoire de maintenir nos niveaux de vie si nous faisons partie des boulets que notre boss va larguer lors du prochain redimensionnement de l’entreprise.
Allez savoir pourquoi le mot "chômage" traumatise tant l'Helvète moyen...
Une bonne nouvelle… ?

Euh… Ben si ton chien pue de la gueule le matin au réveil, tu lui fais mâchouiller les bâtonnets Dentastix Fresh, à la menthe, vendu par Pédigree.

NEMo.

lundi 12 août 2013

Les temps changent.

Le kilo de pain à 2 francs, le litre de lait à 1 francs et des poussières, le litre d’essence 70 à 80 centimes meilleur marché, comme tout le reste. Les filles avaient leur journal intime qu’elles partageaient avec leur meilleure amie, aucun ami n’était virtuel et quand un pote était en retard on l’attendait tranquillement.
Les pharmaciens n’encaissaient pas nos factures ; La Poste ne faisait pas épicerie, le buraliste ne fourguait pas des abonnements de téléphone et le facteur n’était pas stressé par un gadget électronique ; dame Brigitte avait le temps de papoter sur tout et rien dans les locaux du futur Swisscom ; les voisins se saluaient et les vieux se respectaient un peu plus. On a été jeunes et cons aussi, mais plus modérément. Les conflits territoriaux entre jeunes des villes ne duraient généralement pas plus longtemps qu’une bonne bagarre à mains nues, les soirées arrosées se comptaient, mensuellement, sur les doigts d’une main de lépreux et le porno se visionnait sur VHS.
Cet élan de nostalgie qui me fait regretter une époque datant de 25-30 ans plus tôt est-il l’indice trahissant une vieillesse qui s’approche ou le constat que cette vie passée n’était, malgré quelques libertés en moins, pas pire qu’aujourd’hui ? Chacun aura sa réponse. Mais plus on va de l’avant, plus cela se dégrade.

Dans ce passé pas si lointain que cela l’automobiliste Suisse savait quand, au retour de vacances à l’étranger, il se retrouvait sur le bon vieux territoire helvétique : les pneumatiques de son véhicules devenaient plus silencieux, les amortisseurs se calmaient et les rotules de direction respiraient. Il faisait bon d’arpenter le réseau routier et autoroutier Suisse en ce temps là. Aujourd’hui, pour trouver pire que nos routes, il faut aller en Afrique, en Inde ou dans un village Albanais. J’exagère un peu mais les villes sont devenues de véritables champs de bosses pour les suspensions des voitures (je ne parle pas de la multiplication des modérateurs de vitesses – les fameux gendarmes couchés), tandis que nos belles autoroutes ont besoin d’un sérieux lifting. Ceci sans compter que l’ensemble du réseau n’est plus de taille pour absorber convenablement le flux sans cesse croissant d’automobilistes.
Celles et ceux qui en ont marre de perdre leur temps dans les ralentissements, bouchons et autres accidents se rabattent sur les transports publics pour leurs déplacements. C’est tellement plus sûr le bus ou le train…

Dans une époque de jeunesse qui s’éloigne, je ne me souviens pas de trains en retard. Ou très peu.
Les Chemins de fer fédéraux (CFF) c’était kekchoze, une fierté nationale ! Mais le temps a passé et les dirigeants on peut-être préféré s’en mettre plein les fouilles sur le dos des contribuables plutôt que d’entretenir un réseau vieillissant. Du coup le matos lâche et les problèmes de « ligne de contact » ou « ‘d’aiguillages » s’additionnent les uns aux autres et aux erreurs humaines. Ajoutez à cela des véhicules qui traînent sur des passages à niveaux non protégés et les accidents de personnes (suicides) et vous obtenez un joli petchi en gestation.
Maintenant vous triplez la cadence de passage des trains en gare, vous multipliez le nombre de correspondances pour les dessertes locales. Vous additionnez le tout, vous faites la racine carrée et vous divisez par la constante de Kepler pour obtenir l’âge du mécanicien qui a sauté de sa loco le 29 juillet 2013 pour éviter le choc frontal avec un autre train.
Il y aurait 3'000 lignes CFF en service en Suisse. 1'200 d’entre elles n’ont qu’une seule voie pour un trafic bidirectionnel. Des lignes et des employés qui subissent les mêmes ‘’pressions’’ que l’ensemble du système : des humains voulant être rendus avant d’être partis et un directoire qui privilégie le rendement à la sécurité. Les chances pour que cela ne finisse pas dans le drame sont minces.

A la fin mars de cette année, après un début d’année assez chaotique, le big boss des CFF, Monsieur Andreas Meyer, se voulait positif lors d’un entretien, enfin, accordé aux journalistes.
« Nous ne sommes pas en crise » avait-il lancé, avant d’annoncer que, malgré les nombreux incidents, dont la diversité des causes ne constituait pas un fil rouge pouvant mener vers une crise interne, la direction générale a mis en avant, lors du bilan annuel, la satisfaction de leur clientèle et la ponctualité des transports, des indicateurs qui ont évolué de manière positive.
Quant au manque d’informations de la part de la régie lors d’événements qui laissent sur les quais de gare des centaines de voyageurs dans l’ignorance la plus crasse, et l’absence totale de communication de la direction générale pendant ces mêmes événements, le patron explique :
 « Nous avons décidé que les chefs des secteurs Infrastructure et de Sécurité allaient s’expliquer et que je parlerais lors du bilan annuel. Si nous avions traversé une vraie crise, j’aurais naturellement été présent lors de la conférence de presse du début d’année. (…) Et le directeur général se déplace en cas de crise ».
Un DG ça chouchoute les actionnaires, pas les misérables voyageurs qui contribuent jours après jours à son enrichissement. Eux, on les laisse se dépatouiller avec le petit personnel, un petit personnel dont le nombre fond comme neige au soleil pour limiter les charges humaines de la régie.
 
Début août 2013 le DG s’est quand même déplacé pour une conférence de presse suite à une collision frontale entre deux trains en gare de Granges-Marnand. Un choc qui a fait une victime (un jeune conducteur de train) et 35 blessés. L’accident est dû à une erreur humaine : l’autre mécano, celui qui a pu sauté de son train, n’a pas respecté le feu rouge et aucun système de sécurité n’a immobilisé le convoi (de toute façon il n’y en avait pas).
Les victimes de l’accident ont reçu quelques lignes d’excuse et un bouquet de fleurs ; le mécano incriminé rendra des comptes devant la justice, les CFF ne seront pas (trop) lésés et le big boss peut continuer de réclamer, comme il le fait depuis le début de l’année, ses 50 millions pour moderniser l’ensemble du réseau.
Le mécano sera vraisemblablement condamné à une peine avec sursis ; Berne lâchera un petit quelque chose modeste pour les joujoux de môsieur Meyer et subventionnera l’Italie à hauteur de 230 millions de francs pour compléter la ligne ferroviaire du Gothard. Et dans deux semaines tout le monde aura oublié.
A moins que les chinois ne s’en mêlent…
 
Lors de la fameuse conférence de presse il y avait beaucoup de monde, dont pas mal de médias venant de l’étranger.
Une journaliste chinoise venue exprès pour l’événement s’étonnait que ce genre d’accident puisse se produire en Suisse, pays de l’excellence, de la précision et de la ponctualité.
Selon un rapporteur helvétique, les explications fournies par le maître de la conférence, Monsieur Meyer, n’ont pas su convaincre la journaliste de l’Empire du milieu…
Alors si d’aventure les nuées de petits touristes jaunes se détournaient du pays des coucous pour de ferroviaires raisons, nous pourrions être sûrs que Berne ferait les investissements nécessaires pour la modernisation du réseau CFF.
J’exagère encore ? Possible.
 
Quand il fut demandé, par certains de nos politiciens, à M. Ospel, grand manitou de l’UBS, de démissionner suite à je ne sais plus quelle affaire douteuse ayant fait perdre des millions à l’établissement bancaire, celui-ci à bien rigolé. Mais le même môsieur l’avait plutôt saumâtre quelques jours plus tard, à son retour d’un conseil d’actionnaires du côté de Singapour : il a dû démissionner.
Début juin 2013, les responsables des abattoirs suisses ont décidé de tout mettre aux normes chinoises afin de pouvoir exporter directement des pieds de porcs vers la Chine, sans transiter par l’Allemagne comme c’est le cas actuellement. Une décision prise après que des experts de Pékin aient refusé, suite à une visite dans les locaux helvétiques, de délivrer une licence ‘’magique’’.
Deux petits exemples piqués dans les médias locaux qui laissent soupçonner que Pékin prend gentiment les commandes économiques, financières et politiques du monde. Mais même sans cela, il n’y a pas besoin d’avoir fait Science-Po pour savoir que quand le Parti communiste chinois s’interroge, c’est le monde entier qui se gratte la tête.
 
NEMo.

mardi 6 août 2013

Pensée sans titre

Nous savons tous que la guerre c’est moche, que les banquiers n’hésitent pas à mettre la pagaille dans la finance mondiale pour assurer leurs rentes, dividendes et autres revenus, tout comme nous avons pu nous rendre compte que la dette est certainement la plus merveilleuse embrouille à long terme que les banquiers aient mis sur pieds.
Mais sans les banquiers : Pas d’hypothèques, pas de crédits, pas de leasing ; pas de financement de projets et pas d’investissements locaux ou internationaux. Pas de territoires ravagés, de terres violées et pas de populations expropriées (ou moins de…). Pas de rébellions, de révoltes ou de révolutions et moins de police, moins d’armées.

Aujourd’hui, dans une Europe pacifiée, nous devons mettre notre argent, nos salaires, sur un compte en banque ‘’sécurisé’’ parce que bon nombre d’entre nous ont peur de se faire cambrioler leur appartement, comme c’est arrivé au voisin du voisin, ou comme on le lit à répétition dans les médias, ou de se faire agresser en pleine rue.
Alors la police devient nécessaire pour le maintient de l’ordre et la ‘’sécurité’’ des autochtones dans ces beaux pays pacifiés.
Mais à force de promouvoir le confort, la paix du travail et la bonne santé économique d’une nation, ou d’un groupe de nations, il est tout à fait normal de voir arriver des familles ou des parents qui ont tout perdus dans leur pays d’origine, venir chercher dans nos contrées de quoi nourrir leurs enfants, chercher un job qui leur redonnerait un peu de dignité (pas la dignité de travailler, mais la dignité du père ou de la mère !).

Sauf que ces gens qui viennent de loin, des pays dans lesquels nos entreprises ont délocalisé pour faire baisser les coûts du travail ou simplement des pays de nos vacances, on n’en veut pas.
On n’en veut pas trop, juste de quoi nettoyer nos rues, servir des bières, remplir les bordels et les night-clubs, faire nos ménages etc… Le surplus étant à renvoyer, le trop plein étant à maintenir loin de nos rivages. L’armée devient dès lors nécessaire pour contrôler les flux migratoires en plus de protéger cette zone pacifiée.
Une zone pacifiée devenue le domicile des hédonistes, révélant derrière ses grillages la civilisation des plaisirs. Le besoin vital est banni de nos réflexions remplacé par la démultiplication des inutiles envies quotidiennes. Je ne mange plus parce que j’ai faim, mais parce que cet aliment me fait envie ; on ne cuisine plus pour passer un bon moment en famille ou entre pote, on commande des pizze ou les invités font "Top chef" dans votre salon ; je ne m’achète pas un simple téléphone portable mais, en bonne poire, le dernier truc technologique dont je n’utiliserait pas le dixième des applications. La liste de nos inutilités égocentriques est longue…

Tout cela a un prix bien entendu. Je ne parle pas de valeur vénale mais de la Vie que nous perdons et des vies que nous condamnons. L’armée des plus forts reconquiert les anciennes colonies parce que nous avons besoin des ressources qu’elles détiennent. Les "méchants" vaincus, les spéculateurs en matières premières peuvent faire leurs ignobles marchés, soutenus financièrement en ça par nos chers banquiers.
Que des millions d’innocents, hommes femmes et enfants, meurent loin de chez nous pour garantir notre sécurité, notre santé, notre bien-être et notre confort est la condition sine qua non du protocole qui défend nos libertés tellement démocratiques, tellement individuelles. Et nous avons tous accepté ce protocole.

Pour arriver à cette capitulation de l’Homme civilisé les moyens sont aussi divers que variés.
La peur en est un. La peur de voir ces étrangers voler nos jobs, nos richesses et nos femmes ; la crainte de perdre notre pouvoir d’achat, l’angoisse de perdre ces objets qui nous définissent tant et qui témoignent de notre "rang" social.
La télévision est certainement l’outil N°1 pour entretenir nos peurs (elle introduit dans nos salons les guerres et misères lointaines et la criminalité courante) et plonger nos esprits en catalepsie, en plus d’offrir du temps de cerveau disponible à Nestlé, Coca-Cola et tous les autres.
Afin de parachever notre lobotomie, les jeux vidéos sont un allié à ne pas négliger car ils s’attaquent aux jeunes esprits en formation.
Call of duty, comme ses dérivés, banalisent la guerre, la mort sanglante de nos ennemis et la déshumanisation des conflits par l’utilisation de drones, ou autres ‘’robots’’, guidés à distance;
Gran theft auto glorifie la criminalité, la défiance de l’ordre policier établi ;
Toad, de Super Mario Galaxy 2, veut rendre le banquier sympa et trognon.
Mais il y a plus "insidieux", si j’ose : Animal Crossing, un jeu dispo pour les enfants de 3 ans et plus.
Le p’tit Nono a voulu y jouer chez sa sœur. Donc nouveau joueur = nouveau personnage (il voulait son ti bonhomme à lui).
Le jeu commence par un voyage en bus durant lequel le chauffeur pose tout plein de questions. Un petit interrogatoire sympa, dans les règles de l’art qui garde quand même pour beaucoup plus tard la question des préférences sexuelles.
Arrivé dans la ville et son personnage fictif enregistré, Nono doit trouver sa maisonnette. Dès que c’est fait, arrive Monsieur Nook, le vendeur du magasin du coin, qui lui détaille à peu près tout ce qu’il peut trouver dans ce nouveau monde (mairie, magasin, maison des amis, carte topographique, pêche, cueillette, etc…) et, point crucial, que le p’tit Nono lui doit un certain montant pour l’acquisition de sa petite maison.
Le jeu a donc débuté par un fichage et une dette !
Là, pourriez m’dire : « Arrête tes conneries, c’est qu’un jeu ! »
Possible… Comme il est possible de m’imaginer en full parano en pensant que ces jeux, dans lesquels il faut rentrer innocemment de plus en plus d’infos persos, préparent nos jeunes têtes aux futurs fichages et autres partages des données. Et j’omets volontairement de penser aux logiciels espions ou malveillants…
Bref. Pour s’acquitter de sa dette, Nook propose à Nono de venir travailler dans son magasin. Nono, du haut de ses 5 ans et demi, a refusé net. Nook n’apprécie pas et y va de son laïus pour convaincre le joueur d’accepter ses conditions. Sinon Nono ne pourra pas vraiment jouer à Animal Crossing

New Leaf, la nouvelle version du jeu d’Animal Crossing disponible sur la Nintendo 3DS, propose au détenteur de la mini disquette d’être le maître de la petite ville virtuelle : « En tant que maire, tu es libre de développer ta ville comme bon te semble et de créer de nouvelles lois pour ses habitants ».
Des habitants qui seront des potes et potesses possédant une DS3 (pas la Citroën) connectée au net grâce au wifi. Et vive la vie en ligne…
David est, pour le moment, incapable d’entretenir une relation saine avec sa copine du moment et réveille les morts dès qu’il est connecté à je ne sais plus quel jeu d’aventure (il parle très fort dans le micro de son casque), tandis que Biboune (sa sœur), qui n’est pas bavarde pour deux sous avec ses parents, est toute contente lorsque sa 3DS lui annonce qu’elle a "rencontré" X personnes dans les rues de Lausanne.
Et ce n’est pas l’unique exemple d’enfants préférant la vie virtuelle à la réalité familiale, ou de jeunes adultes, le regard figé sur un écran, absents dans le Monde qui vit.

NEMo.