mercredi 26 juin 2013

Guerres et misères oubliées.

« Ils tirent à l’aveuglette, brûlent les maisons, volent le bétail, pillent les biens »
Où ? Darfour, Kivu, Somalie…
Au Darfour cela dure depuis dix ans pour 300'000 victimes et un exode d’environ 2,7 millions de personnes dont près de la moitié vivrait dans des camps inappropriés, sans véritable accès aux soins ni structure scolaire pour les enfants. Durant les cinq premiers mois de 2013, 300'000 civils ont pris la fuite devant des combats qui s’intensifient à nouveau et sur les 6,8 milliards nécessaires pour venir en aide aux réfugiés, seulement la moitié a été versée par les pays donateurs.

3'000 soldats tanzaniens, malawiens et sud-africains pour tenter de neutraliser les groupes armés dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC), surtout dans les deux territoires du Kivu (nord et sud). La plus grande mission de stabilisation d’un Etat, décidée et mandatée par l’ONU, se trouverait en RDC. Son nom : la Monusco ; effectif 17'000 hommes, plus les 3'000 militaires récemment envoyés là-bas ; début de l’engagement : il y a quinze ans.
Efficacité : ZERO. « Elle a été incapable d’empêcher le viol de 150 femmes et enfants à quelques kilomètres de sa base de Luvungi en août 2010. »
« Dix ans après la fin officielle de la guerre, décrétée en 2003, les atrocités se poursuivent au Congo. Le pays n’en a pas fini avec ce conflit qui a fait 5 millions de morts (surtout de faim et de maladie) depuis 1994 ».
Le prétexte de tant de haine ? Un conflit ethnique entre Hutus et Tutsis.
Les implications ? Enormes et multiples : Le Rwanda et l’Ouganda pour commencer qui ont participé au renversement de Mobutu ; Mais comme Laurent Kabila, le successeur de Mobutu, fut jugé décevant par le Rwanda, celui-ci demanda de l’aide au Zimbabwe, à la Namibie et à l’Angola, « tous très intéressés à aider ce pays riche en diamants, or, cuivre, cobalt, zinc, mais aussi coltan (indispensable pour les téléphones portables) et en cassitérite (pour les emballages alimentaires).

Un million de morts ; un autre million de déplacés que le conflit ou la sécheresse ont poussé à abandonner leurs maisons et, comme on aime les chiffres ronds, un autre million de réfugiés au Kenya ou en Ethiopie. Voilà en gros le bilan humain de 22 ans de chaos en Somalie. Une Somalie de laquelle tous les projecteurs se sont détournés, pour se focaliser sur les révoltes arabes.
Tandis que l’opinion publique, bien installée devant ses écrans multimédias, s’insurge contre la persistance d’un Bachar quelque part en Syrie ; tandis que cette opinion publique lobotomisée croit en la vertu de ses politiciens qui font leur tour de manège pour nous faire croire à l’utilisation unilatérale d’armes chimiques contre de pauvres civils innocents ; Alors que les médias rapportent régulièrement les décomptes Onusiens des victimes de cette guerre civile syrienne (le dernier bilan officiel, datant du 13 juin 2013, faisait état d’au moins 93'000 personnes tuées en Syrie, de mars 2011 à fin avril 2013, révélant au passage que « plus de 5'000 meurtres ont lieu chaque mois, commis par le gouvernement ou l’opposition ») et nous offrent des analyses géopolitiques spécialisées d’experts européens du Moyen-Orient, des femmes ont abandonnés leurs enfants en plein désert pour que d’autres survivent.
Comme il n’y a pas de d’hôtels en plein désert, il n’y a peu de journalistes.
Obnubilé par les révoltes arabes, les occidentaux ont détournés les yeux de la Somalie où 258'000 personnes, dont 130'000 enfants, ont péri entre octobre 2010 et avril 2012.
Sécheresse, crise alimentaire, guerre civile ont favorisé le chaos dans la corne de l’Afrique. (Divers articles parus dans le 24 Heures.)

La sécheresse de début 2012 a fait perdre plus de 400'000 tonnes de production agricole à l’Angola et mis 1,8 millions de personnes en insécurité alimentaire dans un pays qui subit déjà les ravages de la malnutrition. En Angola 20% des enfants meurent avant leur cinquième anniversaire.
Au Zimbabwe, c’est 1,6 millions de personnes qui furent menacée par la famine suite à cette même sécheresse qui a détruit 1/3 des plants de maïs alors que les chinois investissaient 300 millions d’euros pour augmenter la capacité d’une centrale hydroélectrique dans le nord du pays. Un Zimbabwe qui pourrait bien replonger dans la violence lors des prochaines élections, comme le Burundi…

Trop occupés à compter les poils pubiens de leurs chers banquiers, les généreux donateurs qui se pavanent au milieu de nos civilisations avancées n’ont pu donner que 3,4 milliards, d’une quelconque monnaie, pour venir en aide à la population du Darfour.
Par contre, quand il faut s’assurer la main mise sur les principales et diverses matières premières du continent Africain…
En 2011 la Chine, l’Inde et le Japon ont investit 35 milliards de dollars sur le continent Africain sans que cela ne change quoi que ce soit dans la crise alimentaire qui se prépare et les famines que ces populations noires subissent à répétition. La critique envers l’Asie semble aisée.

Premier producteur de cuivre en Afrique (et sixième dans le monde) la Zambie tire de ce minerai 80% de ses recettes d’exportation. Depuis 2007, Lusaka a reçu de Pékin près de 4,5 milliards d’euros d’investissements. D’ici à deux ans le canadien First Quantum a prévu d’investir 3 milliards d’euros pour développer une nouvelle mine de cuivre et le gouvernement zambien prévoit une dépense de 3,8 milliards d’euros pour mettre fin aux coupures de courant intempestives qui ralentissent la production minière dans un pays où 60% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté et dont 12,5% sont séropositifs. Comme 15% des Zimbabwéens, 23,3% des Sothos (Lesotho), 1,5 millions de Kenyans et plus de 5,5 millions d’africains du sud. Sur les 34 millions de personnes séropositives dans le monde, 73% d’entre-elle sont regroupées sur le continent africain.

Le Bénin a obtenu, du FMI en 2010, un plan d’aide de 89 millions de dollars ; La Banque mondiale finance également plusieurs projets visant à décentraliser les services de base et à moderniser le secteur agricole, en particulier la production de coton.
La Gambie, autre pays tirant ses revenus de l’agriculture, a reçu une aide en 2012 du FMI : un prêt de 28,3 millions de dollars.

Après les remous qu’a connu la Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara s’est empressé de reconstruire l’économie du pays. Ce qui a plu au FMI, qui a pu donner une analyse positive du pays, ce qui a encouragé la communauté des bailleurs de fonds de s’engager à hauteur de 6 milliards d’euros au financement du plan de développement économique du pays et, au passage, d’effacer une bonne partie de la dette extérieur de la Côte d’Ivoire.

Areva investit 1,2 milliards d’euros au Niger en 2012. Plus précisément dans la mine géante d’uranium d’Imouraren.

Bauxite, rutile, Or, diamants, minerai de fer, les investisseurs étrangers envahissent les mines et l’agriculture du Sierra Leone. En 2012 le gouvernement de Freetown a accordé à neuf nouvelles compagnies étrangères des permis de prospection du pétrole off-shore découvert au large des côtes. Ce qui ne va pas améliorer son indice de développement humain…

L’Union Européenne est le premier partenaire commercial du Cameroun, ce qui booste les exportations nationales de pétrole, de coton, de cacao et de bois. L’économie camerounaise est potentiellement l’une des plus prospère de l’Afrique centrale : Pétrole, terres fertiles, forêts, Or, diamants, cobalt, fer manganèse, étain, uranium, etc. Pourtant ces ressources ne bénéficient pas à la population dont 45% vivrait toujours sous le seuil de pauvreté.

Centrafrique a, semble-t-il, bénéficié de la protection des dieux de l’investissement ces deux trois dernières années : 92 millions d’euros pour moderniser l’aéroport de Bangui, dont 75 millions provenant d’une banque chinoise ; 965 millions venant de la Banque mondiale pour terminer une route devant rejoindre le port camerounais de Douala et enfin 20 millions provenant de la Banque africaine de développement pour un programme d’assainissement d’eau (certainement le seul projet d’intérêt public). Prêts auxquels s’ajoute une assistance de 63 millions de dollars octroyée par le FMI. Sans que l’on en connaisse vraiment les tenants et les aboutissants. Un peu comme le Burkina Faso.

Le Malawi : Tabac, thé, sucre, coton, un prêt du FMI de 120 millions d’euros sur trois ans suivit par les Etats-Unis et le Royaume-Uni, le géant Vale qui investit 750 millions d’euros dans la réhabilitation d’une ligne de chemin de fer dans le sud du pays. Histoire de faire baisser les coûts du transport des biens de 40%.
Vale, qui est aussi très présent au Mozambique (pays voisin du Malawi), participe avec d’autres compagnie minières au financement de 2'000 km de voies ferrées et à l’agrandissement des ports minéraliers et gaziers. C’est que le Mozambique pourrait devenir l’un des plus gros exportateurs mondiaux de gaz naturel liquéfié ; l’extraction du charbon qui tournait à 3 millions de tonnes en 2012, pourrait atteindre, d’ici à une décennie, 100 millions de tonnes/an. Charbon qui sera essentiellement exporté vers l’Asie.

Shell, les français Areva, Alstom, Maurel & Prom et Total ; l’italien ENI et le Chinois Cnooc ; Anadarko, Asperbras, Eurasian Natural Resources, Straker International, Gem Diamonds, Vale ; le numéro un mondial du diamant : De Beers, le numéro un mondial du platine : Amplats et j’en oublie des centaines, ainsi que leur gouvernement respectif savent très bien que sur ce continent la loi du plus sauvage s’impose, la loi du plus corrompu remporte la mise. Le sort des multiples populations soumises aux horreurs répétitives n’important que très peu au final. Un conflit civil ou interethnique règle pas mal de soucis liés au dédommagement pour expropriation et un président chef de guerre sanguinaire coûte moins cher en pots-de-vin qu’un gouvernement à tendance démocratique…

Sur le continent africain près de 70%  des frontières actuelles sont l’héritage des puissances coloniales européennes (les Français ont tracé 25'865 km de frontières, les Britanniques 21'595 km…) et 80 % de ces frontières ressemblent plus à des lignes de démarcation entre empires, qu’à un tracé respectant des territoires d’influence nationale ou ethnique. Alors on a beau parler de décolonisation et d’indépendance, la France est bien partie défendre ses lignes de démarcation au Mali, l’UE se repositionne ouvertement dans les Etats dernièrement ‘’révoltés’’, les Portugais à défaut de trouver du taf en Europe retournent faire ce qu’ils font de mieux en Afrique : construire des maisons. De hauts buildings en l’occurrence...

L’avenir, la survie du Vieux-Continent est-elle indissociable de la misère des africains ? Notre incapacité à régler nos divers problèmes alimentaires, démographiques et énergétiques nous condamnerait-elle à conjuguer notre ‘’Avenir’’ dans une sorte de ‘’Futur antérieur’’ ?

NEMo.

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