samedi 18 mai 2013

Acte de naissance

Si j’ai bien compris une manchette local lue il y a quelques jours, les sages-femmes ont fait entendre leur voix contre une pratique d’accouchement qui semble gagner les faveurs d’un nombre grandissant de futures mamans : la césarienne.
Cette délivrance au bistouri, qui intervenait lorsqu’il apparaissait qu’un accouchement serait long, douloureux, plein de complications et pouvait représenter un risque pour la santé de l’enfant et de sa maman, est devenue un acte de confort.

Fini les fausses alertes qui font courir le couple au milieu de la nuit vers la maternité la plus proche ;
Fini les doutes sur le bon déroulement de l’accouchement ;
Fini les crises d’angoisses dès que Madame connaît les dimensions de l’objet, surtout le diamètre de la tête, à faire passer dans le petit minou ;
Fini le coup de boule interne du futur nouveau-né sur le bout du coccyx de Madame, pour dégager le passage ;
Fini la ventouse, le forceps et la découpe du périnée et son raccommodage, à vif. Bien sur si Madame a opté pour une péridurale, toutes ces petites douleurs deviennent subjectives.
Fini les cours de prépa pendant lesquels la gentille sage-femme, qui sera de toute façon absente le jour ‘’J’’, vous expliquera en détail le déroulement des opérations, les diverses méthodes d’accouchement, les possibles complications et vous fera visiter les trois chambres de travail. Profitez de la visite, parce qu’après ce n’est pas sûr que vous puissiez vous attarder sur la déco,
Profitez aussi de ces cours, Messieurs : c’est peut-être la seule fois que vous entendrez une femme dire que vous pouvez être utile et que vous avez un rôle à jouer dans l’événement à venir. A l’exception de celui de conduire vite en évitant les bosses le jour de votre ‘’Noël’’ et de chéquier vivant le reste de l’existence de votre enfant.

La césarienne de confort, c’est tout bénef : l’alien a un bail de neuf mois ! Comme il n’est pas question d’attendre une minute de plus qu’il veuille bien quitter les lieux, on lui envoie l’huissier et les CRS avant qu’il vandalise tout l’intérieur ; Ainsi, Môsieur ne sera pas choqué en voyant le crâne de son gosse entre les cuisses de Madame ou éventuellement dégoûté quand on lui proposera de voir le placenta et surtout, il ne sera pas tenté d’expérimenter la capacité de dilatation de la choupinette à Chouchou en voulant y introduire la bouteille de champ’ bue pour les 5 ans de vie commune.
Pas folle la guêpe…

Alors les sages-femmes se rebiffent ! Elles montent au créneau pour défendre ce lien inaltérable qui unit, dans la douleur la mère à son enfant, cet Amour qui fait disparaître toutes les souffrances lorsqu’elles déposent contre le sein de la mère l’enfant auquel elle vient d’offrir la Vie ; les sages-femmes se battent pour défendre leur job, mettant en avant leur longue expérience faite de pratiques et de théories.
La sage-femme sait mieux que Madame ce qui se passe dans son utérus ; la sage- femme sait différencier la banale contraction du coup de semonce qui annonce l’arrivée du petit lardon ; elle sait quand elle doit vous perfuser ou vous envoyer faire mumuse avec la grosse baballe. Comme cette jeune femme qui, en toute fin 2012, n’a pas réussi à convaincre la sage-femme de service au CHUV sur l’arrivée imminente de son enfant : « J’étais au bon endroit, au bon moment mais je n’ai pas pu accoucher normalement car une sage-femme n’a pas su m’écouter ! »
Résultat, elle accouchera toute seule dans les toilettes du Centre Hospitalier Universitaire Vaudois.
La direction ne se fendra même pas de quelques mots d’excuses, préférant relater le cas d’un point de vue statistique…

Comme je vous le disais, Mesdames, la gentille sage-femme qui coach en cours de préparation à l’accouchement, n’est pas souvent disponible en fin de soirée. L’heure à laquelle les bébés se réveillent dans le ventre de leur mère (en règle générale).
Et si vraiment vous manquez de chance, vous aurez droit à la pire des salles de travail et la vieille sage-femme de l’équipe, formée au Vatican selon de vieux rituels…
« Ah te voilà petite catin… Tu as forniqué avec un homme avec lequel tu ne t’ais pas unie devant Di-euuu ! Maintenant tu vas expier de ton péché dans la souffrance, tu vas expier comme toutes celles de ton genre qui ont la cuisse légère du péché originel…. »
J’exagère un peu, mais de ces vieilles folles qui revendiquent pour vous, Mesdames, votre droit à la souffrance et transforment un acte de naissance en exorcisme, il en existe encore…

De toute manière, a en écouter les femmes, un accouchement cela ne se passe jamais bien.
Le père est absent et c’est galère ;
Il était là mais n’a pas voulu rentrer en salle d’accouchement ;
Il était là mais complètement tétanisé, blanc comme un linge ;
Il était présent mais il vous a gonflé avec sa Zen attitude et ses techniques de respiration à deux sous ;
« Tout c’est bien passé, mais putain de douleurs ! » ;
« Non c’était top, j’ai demandé la péridurale. Sauf que la sage-femme était complètement nouille : Elle s’y est reprise à trois fois ! » ;
Et si au final vous optez pour la césarienne, c’est la bouffe qui sera dégueulasse.

Bref. Si vous avez la chance de participer à cet acte de création de la Vie et de pouvoir le vivre en symbiose à deux et demi, trois, c’est un moment unique d’échange et de partage, un moment de pure émotion où l’énergie circule librement dans un triangle d’amour qui irradie de la sérénité dans tous les sens.
Profitez-en, cela ne dure qu’un temps. Après la société vous rappelle, votre ego reprend le dessus et c’est la M qui s’installe…
Et quand, bien des années plus tard, vous regarderez l’album de naissance de votre aîné, ce n’est pas sûr que les photos ramènent à la surface les émotions que vous avez ressenties quand vous êtes devenus parents. C’est même pas sûr que vous retrouviez le fameux album, ou le CD-rom, ou le nuage…

NEMo.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire