dimanche 13 septembre 2015

Les images.

Moment figé dans l’éternité. Souvenir d’un instant de bonheur, d’un moment de joie ; première échographie et souvenir d’un défunt. Promesse de vacances ‘’réussies’’ et témoignage poignant d’un événement ‘’vécu’’.
L’image a toujours été un important ‘’outil’’ de communication.
L’image se gravait, se peignait, se racontait. Aujourd’hui elle se ‘’clique’’ et se commente.
Je poste mes ‘’images-de-moi-même’’ sur mon réseau social pour les partager avec mes amis : cela m’évite d’attendre que les photos soient développées, au retour du voyage, et de les trimbaler avec moi pour les montrer physiquement à mes potes. Ou pire, de prévoir une soirée ‘’photo-potes’’ à la maison…

Il y a les images qui nous montrent ce à quoi nous devons ressembler : comment il faudrait nous vêtir, comment nous parfumer, comment nous nourrir, comment nous reproduire, etc.
Regardez ce que vous devez acheter pour que les autres vous voient et faites tout plein d’autres ‘’images-de-vous-même’’ : « Regâaardez-moi… ! Adorrrrez-moi… »
Je pourrais être une bimbo quelconque aux gros nichons, qui fait le buzz planétaire parce que j’ai foutu une photo du cul de son chien sur Instagram.
Je suis beau ! Mais je suis aussi intelligent et sensible. Les belles images avec les belles paroles, les belles pensées, que j’affiche (électroniquement) un peu partout en témoignent.
Je n’ai plus à réfléchir ; même pas à comprendre. Juste savoir faire des recherches, savoir encore lire, un peu, et trouver le ‘’bouton’’ « Partager ».

L’informatique me permet de modifier n’importe quelle image. On s’en fout des détails. Mais je peux photographier une maison, lui donner un décor lunaire avec un ‘’levé de Terre’’ et mettre des pin-up Pirelli sur le perron en faisant ‘’causer’’ le chat siamois qui garde l’ide.
Je peux faire tout cela avec quelques connaissances informatiques, mais serais-je capable de le dessiner, de le créer de toute pièce, de le faire naître sous la mine de mon crayon gris ?
Nous sommes capable de ‘’reproduire’’ un amas de traits qui ressemblera vaguement à quelque chose, une chose à laquelle nous donnerons un nom. Mais nous ne sommes plus vraiment capable de créer quelque chose qui sortirait tout droit de notre imaginaire.
Notre créativité est formatée par des règles et des dogmes auxquels il ne faut pas toucher. Mais avant cela, les multiples écrans des multimédias qui cernent l’enfant de toutes parts ont aussi leur part de responsabilité dans l’annihilation de l’esprit créatif humain.
Voyez les dessins des enfants, à la rentrée de leur toute première classe, voire la deuxième, puis comparez les. Vous trouverez, sans trop de difficultés, les enfants qui ne passent pas leur temps avec un écran et qui ont la chance que leurs parents racontent une histoire avant le ‘’dodo’’.

Une étude, assez récente et dont je en trouve plus la référence, affirmait que l’esprit du spectateur adulte, qui se retrouve entraîné dans une débauche d’effets spéciaux cinématographiques, réagissait de manière identique à l’esprit d’un nourrisson, de quelques mois à peine, qui commence à découvrir visuellement son ‘’monde’’.
L'étude démontrait que les enchaînements successifs d’images colorées, auxquelles vous incorporez quelques flashes lumineux, soutenus par une mélodie dont vous faites varier le l’intensité musicale et sonore, ont quelque chose d’envoûtant, d’hypnotique.
Nos esprits, et l’esprit de nos enfants, n’ont plus besoin de créer les images fantasmagoriques qui vont avec les histoires que racontaient nos arrières grands-parents. Les contes modernisés s’en chargeront avant qu’Hollywood et les médias ne prennent le relais.
Juste comme ça, en passant… Qu’avez-vous retenu, quelle scène vous a ému dans le film Titanic de James Cameron ?
Qu’importe les milliers de noyés du moment que l’Amour triomphe ?

De 1993 à 2012, l’estimation à minima d’une hécatombe ignorée, avançait un chiffre supérieur à 16'000 migrants morts aux portes étanches de l’Union Européenne [Selon un méticuleux travail d’Olivier Clochard, du laboratoire Migrinter à Poitiers]. Les trois-quarts engloutis dans la fosse commune de la Méditerranée.
En moyenne 1'778 personnes décédées par année. Cela ne semble pas énorme, environ 4.5 x plus que les morts sur la route en Suisse.
Mais selon certains observateurs, ce chiffre serait à multiplier par 3, voire 5, pour ces dernières années.
Les médias nous parlent de bateaux qui chavirent, de centaines de disparus, hommes, femmes et enfants. Mais nous montrent presque toujours des embarcations qui flottent encore. Quand ce n’est pas le cas, les caméras filment des ‘’migrants’’ qui nagent, qui s’accrochent aux rochers pour ne pas être emporté par la mer.
Lampeduza. L’Europe des politiques fait mine d’être scandalisée. Plus jamais ça. Les marines nationales prennent le large pour montrer à l’opinion publique qu’elle a le problème bien en main.
Mais, faute de budget, ces missions militaro humanitaires ne sont pas programmées pour durer.
L’impuissante UE informelle se réunit. Prend des mesures. Installe des ‘’centre de tri’’ pour réfugiés dans le sud de son territoire.

Là, le terme choque parce qu’il renvoie à ce ‘’passé’’ que l’on ne cesse de nous re-commémorer. Par obligation.
Alors se noie, comme se sont noyés avant lui des centaines d’enfants, le petit Aylan. A l’autre bout de la Méditerranée…
Son inadmissible mort ne passe pas inaperçue. Un reporter est là, pour l'immortaliser. L'image fait le tour du monde, sans forcément que quelqu'un se sente être: "Aylan".
Maintenant, pour être sûr que tout le monde comprenne bien le sens et la signification de ‘’la’’ photo, le reporter est invité sur les plateau de télé pour recontextualiser son ‘’cliché’’.

L’Europe ne sait plus comment s’indigner. Alors elle part sur la trace des migrants. Celles et ceux qui fuient les conflits et qui espèrent re-trouver un peu de leur dignité au bout de la voie ferrée.
Le petit Aylan a eu ses funérailles.
Les médias nous montrent alors les barbelés de la frontière Hongroise.

Il arrive même parfois que nos présentateurs télévisuels fétiches nous avertissent, l’air grave que « Certaines images peuvent heurter la sensibilité (…)».
Dès lors arrivons-nous encore à imaginer la réalité d’un drame, quel qu’il soit, sans qu’une photo choc tape momentanément l’incruste dans notre esprit, et nous horrifie ?
Et attention à ce qui nous horrifie, à l’insoutenabilité des images que l’on nous propose. Des images qui sont visionnées et censurées avant de nous être diffusées, afin qu’elles puissent être regardées par le plus grand nombre. Et nous voilà horrifié alors que nous ne sommes même pas encore entré dans l’antichambre de l’horreur.

L’Europe ne sait plus commet réagir. L’a-t-elle su un jour, d’ailleurs ? Des groupes de bénévoles partent à la rencontre des migrants. Là je ne parle pas d’ONG qui change de pays, mais de citoyens qui vont accueillir les voyageurs de l’extrême à la gare du coin.
Vous souvenez-vous de l’expression hébétée de ces migrants applaudis par une foule de bénévoles à leur arrivée dans je ne sais plus quelle gare ?
On fête leur arrivée à coups de banderoles qui souhaitent la ‘’Bienvenue’’ ! Et nous les félicitons, pour avoir surmonté toutes ces terribles épreuves qui ont jalonné son voyage…

C’est quoi la prochaine étape ? Une chaîne merdique de téléréalité va sélectionner une cinquantaine de familles syriennes pour un remake sordide de ‘’Pékin express’’, avec comme récompense pour les dix premières familles arrivées à destination un somptueux logement dans un container duplex, un chèque de 500 euros et un contrat de travail à durée déterminée chez Amazon ?
Le migrant est devenu un outil médiatique, politique et surtout économique.

La Suisse qui se pâme dans son ‘’excellence’’, manque cruellement de main d’œuvre qualifiée. Une main d’œuvre qu’elle n’a plus le temps de former face à l’immédiateté du besoin de croissance. Par chance pour l’économie nationale, ces diplômés migrants auront des exigences salariales moins ‘’contraignantes’’ que l’étudiant AOC fraîchement récompensé pour ses années d’études acharnées.
Mme Merkel l’a parfaitement compris.
Dans l’espace du Grand Marché Transtlantique qui se prépare silencieusement, l’arrivée ‘’massive’’ d’une main d’œuvre, qui sera peu regardante de ses futures conditions travail, est une aubaine économique pour les futures signataires des accords TAFTA-TTIP.
Des accords qui vont méchamment mettre à mal le quotidien économique de plus d’un milliard d’individus. Européens.

Nemo.

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