Le hasard
du calendrier fait bien les choses.
Le résultat
du premier tour des régionales Françaises, qui a confirmé l’encrage du Front
National dans le paysage politique Français, a occupé toutes les chaînes
d’infos par le biais d’éditions spéciales qui ont cherché à expliquer la
déconvenue des principaux partis qui, à force de se partager le pouvoir depuis
si longtemps, n’ont peut-être plus le temps, ou l’envie, d’écouter les
revendications de leur électorat.
Cette
victoire historique de la clique à Marine a occulté l’événement majeur pour
l’avenir de nos petits enfants : L’annonce du PNR européen, dans la
première semaine de décembre, et la COP 21.
La COP 21,
de son côté, avec son défilé de limousines blindées escortées de 4x4 tout aussi
blindés, de dîner dans des restos hors de prix et de déclarations d’intentions
orchestrées par les coups de marteau de Monsieur Fabius, a presque fait oublier
que le territoire Français est en ‘’état d’urgence.’’ Presque... Parce qu'il est pour le moment interdit de manifester sur le territoire Français. Ce qui, du coup, a empêché les écolos et autres défenseurs de notre belle planète, de venir dire haut et fort tout le bien qu'ils pensent de notre société ultralibérale.
C'est qu'il faut rassurer le concitoyen. Ramener l'ordre dans les rues de Paris.
Alors, pour que « l’ordre juste », selon Ségolène
Royal, s'établisse, une frange de la population résidente en France est soumise à des
perquisitions administratives – qui bien souvent ne donnent aucun
résultat ; que des personnes sont assignées à résidences – pour de bonnes
raisons ; que le vide juridique permettant de légiférer efficacement
contre le prêche via internet soit rapidement combler, avec son assortiment de
sanctions appropriées ; que des mosquées soient fermées.
Des mesures
légitimées par les actes que nous connaissons toutes et tous ; des mesures
qui permettront à l’état de droit de triompher, parce que « la France est une référence en terme d’Etat
de droit. » [Ségolène Royal sur iTélé le 17.11.2015]
Durant la
même journée, et quelques dizaines de minutes avant les propos de Mme Royal,
Monsieur Valls prononçait ses trois petites lettres : PNR, face aux
caméras en expliquant les mesures décidées par son supérieur hiérarchique,
Monsieur François Hollande, 24 heures plus tôt devant le congrès.
Tantôt chef
de guerre, dans un discours que n’aurait pas renié Georges W. Bush, Hollande
président annonçait la riposte, les représailles : « Nous sommes engagés dans une guerre contre
le terrorisme, contre les djihadistes qui menacent le monde entier et pas
seulement la France. » S’engageant, vis-à-vis de ses concitoyens à
« mettre toute la puissance de
l’Etat au service de [leur]
protection » et précisant que « dans cette guerre qui a commencé, il y a de nombreuses années, l’ennemi
n’est pas hors d’atteinte, pas insaisissable. »
Condamnant
la Syrie – « devenue la plus grande
fabrique de terroriste que le monde ait connu » au déluge de bombes.
Chef de guerre et rassembleur quand il parle de sa prochaine rencontre avec
Messieurs Obama et Poutine ou qu’il fait allusion à l’article 42;7 du traité de
l’Union européenne.
Tantôt
humble et reconnaissant dans le témoignage de gratitude envers les secouristes
et « le système de santé qui était
préparé à ce genre de mission. » Parfois paternel dans l’évocation de
la jeunesse des victimes. Sans oublier la fibre patriotique : « La France est une lumière pour l’humanité et
quand elle est atteinte, c’est le monde entier qui se retrouve dans la
pénombre. »
Tout y
était pour que les Françaises et les Français perçoivent en leur président un
père, un protecteur et le chef des armées. Gageons qu’il aura plus de moyens
financiers pour aller combattre et détruire l’Etat islamique, que pour inverser
la courbe du chômage.
Et c’est
dans ce même discours que ces trois lettres : PNR, furent lâchées dans une
de ses fins de phrases expirées dont les hommes politiques ont le secret.
Donc,
qu’est-ce qu’un PNR ?
Indices : Ce n’est ni le Parti national rénovateur Portugais, ni un Parc
naturel régional.
Le
gouvernement britannique a débattu sur ce sujet il y a quoi, environs une année
je dirais. Bien sûr, comme pour toute mise en œuvre d’un ‘’nouveau’’ système de
surveillance, il y a ceux qui sont pour et ceux qui sont contre. Avant Paris,
les initiatives visant à redonner de l’anonymat aux internautes étaient portées
par un vent libertaire, si j’ose. Après, légitimement, les choses vont se
compliquer. Comme la toute récente décision de supprimer le Wifi gratuit dans
les lieux public.
Suite au
reportage diffusé sur Euronews, concernant le PNR Anglais, j’ai fouiné sur le
net en mode Google.ch
Un PNR,
c’est un Programme National de Recherche. Affublez l’acronyme d’un numéro, PNR
74 par exemple, et vous obtenez un programme de recherche sur le ‘’système de
santé’’ visant à soutenir la recherche innovante sur les services de santé,
organisé par le FNS (Fonds national Suisse.)
Le même
fonds (FNS) a financé, entres autres, le PNR 61 qui s’est penché sur la
‘’gestion durable de l’eau’’.
Le 69 fut nommé : Alimentation saine et
production alimentaire durable, et le 34 traitait des ‘’médecines
complémentaires’’.
Le PNR 703
est un écran LCD de Sharp et le PNR 820 SL un dégraissant industriel.
Rien de
bien méchant à première vue.
Je change
deux petites lettres à ma recherche, et m’oriente vers Goole.fr pour entrer
dans le vif du sujet.
Pour
Monsieur Hollande, et ses homologues européens, un PNR européen c’est bien
l’équivalent moderne du programme FISA (Foreign Intelligence and Surveillance
Act) américain, qui permettait de surveiller tous les échanges d’information et
de données transitant par les ‘’clouds’’ et les réseaux sociaux, suites aux
attentats de septembre 2001. Dans la foulée, Washington avait imposé à ses alliés des accords
comme le PCSC (« Prevent and Combat Serious Crime ») qui introduisait
un accès automatisé réciproque aux bases de données des polices sur le vieux
continent.
Le PNR
européen va aller plus loin, parce que se seront toutes les données
informatisées contenues dans le monde virtuel qui seront réunies et compilées
dans un seul et même service. Pour nous, en Suisse, cela équivaudrait à
regrouper les données des assurances maladies, de l’office des poursuites, les
casiers judiciaires et les informations recueillies par la police ou
gendarmerie, ainsi que les informations laissées au ‘’Contrôle des habitants’’
et sur les réseaux sociaux dans un seul et unique ‘’service’’.
Voilà ce qu’ambitionnent
les accrocs du tout sécuritaire qui fantasment sur un monde à la Minority report.
Alors oui,
les récents et tragiques événements survenus en France encouragent cette
réponse sécuritaire et soit-disant sécurisante. Mais je ne peux m’empêcher de
penser, et de comparer ces mesures de surveillances à la multiplication de
radars routiers et autoroutiers.
Rien à
voir, pourriez-vous penser. Possible. En attendant, la volonté politique de
faire la chasse aux chauffards, de mettre en place un ‘’code de la route’’ plus
répressif avec pour objectif de voir baisser le nombre de morts sur les routes
rejoint le besoin, qu’à le citoyen, de se sentir en sécurité sur la voie
publique.
Alors, ému par les
accidents de la route qui déchirent les amis ou déciment les familles, le
citoyen accepte, bon gré mal gré, la présence du radar tout au long de son
trajet.
Si le radar
remplit son rôle dissuasif, il n’empêchera jamais un accident. Cependant, le
radar n’analyse pas, il sanctionne. Vous pourriez passer devant 254 fois à la
vitesse réglementaire, il vous flashera quand même quand vous passerez une fois
trop vite. Sans que vous soyez, pour autant, un de ces chauffards que les
politiciens veulent neutraliser.
Le radar ainsi installé à cause des chauffards,
surveille et sanctionne tout le monde.
Il en va de
même pour tous les systèmes de surveillance censé détecter une quelconque
menace terroriste. La reconnaissance faciale a fait de nets progrès, les
systèmes d’analyses comportementales aussi. Mais ils restent impuissants quant
à la prévention d’un crime.
Une caméra thermique qui repèrerait une personne au
comportement douteux pourra tout juste permettre de détecter un petit criminel,
novice et stressé, qui s’apprête à commettre son premier délit. Qu’en est-il
pour le terroriste convaincu d’œuvrer dans la voie de dieu ?
Qu’est-ce qui
pourrait le différencier dans une foule de badauds, au milieu d’individus qui
ont toutes et tous le sentiment d’être dans le ‘’juste’’ ? Rien !
Salah
Abdeslam, bien que pas encore officiellement recherché et toujours introuvable,
s’est bien présenté à un poste frontière franco-belge quelques heures après les
attaques meurtrières en plein Paris. Et ils sont passés, lui et son chauffeur,
calmement, comme si de rien n’était.
Quel système
de surveillance et de sécurité aurait pu dire, avant que son nom ne soit cité
que, lui Salah, était responsable ? Aucun.
Et le système qui le pourrait
n’existera probablement jamais.
Mais comme
on ne peut se résoudre à l’impuissance de nos forces de l’ordre, de forces de
sécurité, ni se résoudre à être de quotidiennes victimes potentielles, on
accepte de croire qu’un PNR européen permettra de prédire l’imprévisible. Et
nous acceptons aussi que l’on puisse interpeller une personne pour une
intention.
Je reprends
mon automobiliste pendant quelques lignes. Les futurs systèmes de surveillances
connaîtront tout de son quotidien : Son lieu de travail, comment il s’y
rend, l’heure à laquelle il programme le réveil sur son smartphone, etc.
Un matin ce
brave homme zappe vraiment son réveil. Comme ‘’Google spy’’ sait que cet homme
se fait une fierté de ne jamais être arrivé en retard à son taf, le système en
informe la gendarmerie qui viendra amender cette personne pour ‘’excès de
vitesse’’, juste avant qu’elle ne prenne place dans son véhicule.
L’intention
sera supposée par un système qui analyse des données passées.
Encore une
fois il est possible d’objecter que de se lever en retard n’a rien à voir avec
la découverte d’armes de guerre dans un appartement. Certes. Mais je le
répète : Quand la police recherche une personne, c’est bien TOUTE le
population qui est observée.
Et
l’analyse comportementale, qui validera la répression avant l’acte, va plus
loin. Il nous est conseiller de ne pas faire d’amalgame, de ne pas plonger dans
une islamophobie déraisonnée. D’être capable de discernement. Cependant, la
théorie des frères tueurs fait son chemin. Le grand frère qui entraîne le plus
jeune vers la radicalisation, le mari qui encourage sa femme, sont bien des
voies qui mène vers un certain amalgame. Des réflexions qui, associées à des
données de ‘’sécurité sociale’’, d’ANPE et d’Etat civil, permettront de
catégoriser les populations.
Cette
manière de faire n’est pas nouvelle. Elle a permis l’éclosion de quartiers
défavorisés, de banlieues, de ghettos, entraînant son lot de discriminations en
tous genres avec les résultats que l’on connaît.
Quelles
chances sont laissées aux ‘’autres’’ d’être autre chose que ce que dans quoi
nous les enfermons ?
Cette
question est valable autant pour nous que pour celles et ceux qui veulent
radicaliser le monde entier. Mais voilà, Anne Hidalgo ne débattra qu’avec des
personnes ayant son même niveau d’intelligence…
Pour
conclure. Toute l’Europe recherche Abdeslam Salah. Celui qui, selon la revendication
de EI, aurait dû finir au paradis du steak haché le 13 décembre 2015, comme
tous autres agresseurs ce jour là.
Mais voilà.
Salah le radicalisé ne s’est pas fait péter. Pourquoi ?
Mauvaise
utilisation ou défectuosité du matériel, comme dans le Thalys ?
Radicalisation approximative ?
Son « coup de fil à un ami », non
radicalisé et emprisonné dans la prison de Namur, l’a-t-il fait changer
d’avis ?
Soubresaut de conscience ?
Lui seul à
la réponse.
Mais je doute que nous n’ayons jamais la possibilité d’entendre sa
réponse.
Une réponse
qui peut invalider, ou renforcer, les thèses qui encouragent un PNR européen.
Une
dernière chose. Combattre la radicalisation est primordial. La France, et
d’autre pays avec elle, a décidé d’utiliser la manière forte. C’est le choix de
son gouvernement. Mais il faudrait aussi que le gouvernement actuel redonne de la confiance en l’avenir à son peuple, toutes générations et classes sociales
confondues, et remette de l’ordre dans ses prisons.
Nemo.
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