jeudi 1 octobre 2015

COP21: Paris à l'heure du climat ou à l'heure GMT?

A Paris, bientôt, ceux que l’on décrit comme les grands de ce monde se réuniront pour parler de notre biosphère.
Entre-temps, dans l’ombre se négocier le cadre législatif et les conditions générales qui seront inscrites sur les nouvelles tables de lois commerciales qui conditionneront les échanges transatlantiques entre les Etats-Unis et l’Union européenne.
Selon les ‘’négociateurs’’ il faut que tout les accords du GMT (Grand Marché Transatlantique) soient signées d’ici fin 2015. Et pour ce faire les plus gros actionnaires et des hommes politiques, des deux continents, se réunissent régulièrement afin de faire avancer ce projet.
Maintenant quand on voit l’influence que peut avoir la politique dans le monde économico-financier, il n’y a plus de doute possible sur ‘’Qui’’ mènera le bal quand ces accords seront signés.

La règle de base qui devra régir tous les futurs échanges commerciaux entre les deux continents est simple : Supprimer tout ce qui peut empêcher la bonne marche des affaires. A l’aide d’acronymes aussi divers que variés, TAFTA, CETA, TISA, TTP, TTIP, ACS, une nouvelle vague d’ultralibéralisation se prépare à déferler sur les riverains de l’océan Atlantique. Des conditions salariales trop coûteuses aux normes de qualité dans l’alimentation, en passant par la levée des barrières qui freinent le transfert des flux de données informatiques.
En gros, le sort de plus d’un milliard de personnes est entrain de se jouer dans la plus grande discrétion possible.

A titre d'exemples.
L’industrie américaine de la viande entend obtenir la suppression de la règle européenne qui interdit les poulets désinfectés au chlore. A l’avant-garde de ce combat, le groupe Yum !, propriétaire de la chaîne de restauration rapide KFC (Kentucky Fried Chicken).
D’un autre côté, l’Institut américain de la viande déplore « le rejet injustifié [par Bruxelles] des viandes additionnées de bêta-agonistes, comme la chlorhydrate de ractopamine (1).» Un produit dont même la Russie et la Chine ne veut pas dans sa viande.
Pourtant, « les producteurs de porc américains n’accepteront pas d’autre résultat que la levée de l’interdiction européenne de la ractopamine (1). »

L’industrie américaine voudrait aussi que le GMT avance sur la question des OGM en supprimant leur labellisation ainsi que les normes de traçabilité. Propos tenu par l’Association nationale des confiseurs.
On peut taper sur le dos des ricains, mais cette volonté de faire disparaître toutes traces de la provenance des produits est également soutenue dans les industries européennes de l’agroalimentaire.
De son côté, Monsanto et leurs amis, ne cachent pas leurs espoirs de voir enfin la possibilité d’imposer aux Européens leur catalogue foisonnant de produits OGM en attente d’approbation et d’utilisation. La nouvelle zone de libre-échange transatlantique fait miroiter le rêve de voir « le gouffre qui se creuse entre la dérégulation des nouveaux produits biotechnologiques aux Etats-Unis et leur accueil en Europe (1)» soit prestement comblé.

Le GMT propose d’uniformiser les normes techniques, financières, sociales et sanitaires. Parmi tous les accords et autres manigances englobées par le GMT, il y a l’ACS (Accord sur le commerce des services).
Si cet accord, qui est « actuellement discuté par une cinquantaine de pays entrait en vigueur, une multinationale de la restauration collective pourrait contester à une ville la subvention que son conseil municipal a voté en faveur de la cantine publique (2). » Cet accord renforcerait également le pouvoir des tribunaux d’arbitrage « où des entreprises poursuivent des nations ayant osé augmenter le salaire minimum (2). »

Selon le PDG d’American Express, le droit de l’investisseur ce définit comme suit :
« Le droit d’investir ce qu’il veut, où il veut, quand il veut, comme il veut et d’en retirer le bénéfice qu’il veut. »
Le GMT va bien sûr dans ce sens avec comme but final d’imposer « l’élimination, la réduction ou la prévention de politiques nationales superflues [Final report, High level working group on jobsand growth, 11 février 2013, http://ec.europa.eu ]  » étant considéré comme « superflu » tout ce qui ralentit l’écoulement des marchandises, comme la régulation de la finance, la lutte contre le réchauffement climatique ou l’exercice de la démocratie (1).

On parle beaucoup des Etats-Unis et de leurs industries mastodontes qui veulent écraser le monde de leurs produits manufacturés, ou autres. Pourtant, il serait faux de croire qu’il s’agit d’un projet américain visant à conquérir économiquement l’Europe. C’est fait depuis longtemps.

‘’S’agit-il d’un projet que les Etats-Unis ont imposé à l’Union européenne ?
Pas le moins du monde : la Commission, avec l’accord des vingt-huit gouvernements de l’Ue, promeut activement le GMT, qui épouse son credo libre-échangiste. Le projet est par ailleurs porté par les grandes organisations patronales, comme le Dialogue économique transatlantique (Trans-Atlantic Business Dialogue, TABD). Créée en 1995 sous l’impulsion de la Commission européenne et du ministère du commerce américain, cette organisation, désormais connue sous le nom de Trans-Atlantic Business Council (TABC), promeut un « dialogue fructueux » entre les élites des deux continents, à Washington et à Bruxelles (3).’’
Et la Deutsche Bank en a assez que les autorités de contrôle américaines viennent mettre leur nez dans les affaires des grandes étrangères opérant sur territoire US.

Les accords du Grand Marché Transatlantique doivent être signé d’ici fin 2015. Alors quand j’entend un ministre quelconque d’un autant quelconque état européen demander une réunion d’urgence des ministres de l’Ue, pour parler d’un problème de sécurité dans les trains internationaux, par exemple, ou pour parler de la crise des migrants, cela me fait sourire jaune.
Et du coup j’ai un doute sur ‘’l’intégrité’’ de la prochaine rencontre au ‘’sommet’’. Parleront-ils vraiment et uniquement de notre environnement, ou des impératifs économiques se glisseront-ils dans les discussions, ou seront-ils discutés à part ?
Ces personnalités vont-elles, un jour, défendre la cause de notre planète et le jour suivant se réunir pour ratifier les dernières ‘’mises au point’’ du GMT ?
Vont-elles, les premiers jours, prendre des mesures efficaces pour faire diminuer les émissions de gaz carbonique dans notre atmosphère et, le jour d’après, abolir le système européen de quotas d’émissions de gaz à effet de serre, qui oblige les compagnie aérienne à payer pour leur pollution au carbone, comme l’exige l’organisation Airlines for America ?

Ces grands décideurs vont-ils choisir de financer toutes les nouvelles technologies qui permettraient de passer dans un monde ‘’bas carbone’’ le matin, et continuer d’allouer chaque année 650 milliards de dollars en subventions ou exonérations aux énergies fossiles l’après-midi ?
Parce que le gros problème pour changer de mode de vie n’est pas tant dans la volonté des acteurs, mais bien dans le financement, dans les investissements que nécessite une telle transformation.
Sans oublier que pour aider les pays les plus vulnérables à s’adapter et à s’engager sur une voie ‘’écologique’’, il faudra investir et les aider à investir. Et si les Etats ‘’riches’’, riches de leur dette, se lancent sur ce long chemin en promettant de l’argent, il faudra qu’ils disent où ils vont aller chercher l’argent pour les financements, dits ‘’innovants’’.
L’heure de la taxe sur les transactions financières est-elle venue ? Comme le serait celle de la taxe carbone, ou la fin des subventions aux énergies fossiles ?
Les arguments des ‘’ministres’’ de l’environnement l’emporteront-ils sur les illusoires promesses de croissance, liées au GMT, et avancés par les ‘’ministres’’ des finances et de l’économie ?
Les ‘’riches’’ accepteront-ils de transférer leurs nouvelles technologies dans les pays ‘’pauvres’’, là où elles seront vraiment utiles et nécessaires, ou persévéreront-ils dans leur fuite en avant qui met, et mettra, des millions d’individus sur les routes de la migration, pour le plus grand bonheur des délégués aux Ressources humaines ?
L’économie est une science dans laquelle l’homme n’est pas pris en compte. C’est pourtant ‘’elle’’ que nos dirigeants privilégient au détriment de l’écologie qui, elle, tient compte de l’homme sur cette planète.

Pendant combien de temps encore l’humain sera-t-il considérer comme une ‘’ressource’’ facilement renouvelable, un produit issu de la Vie mais devenu dissocié de l’environnement qui le porte, le nourrit et le fait vivre ? Parce que si la Terre meurt, nous disparaissons.

Alors en décembre, espoirs pour les générations futures ou confirmation d’une lente agonie ?

Nemo.

(1) Lori M. Wallach, Le traité transatlantique, un typhon qui menace les Européens, Le monde diplomatique – novembre 2013.
(2) Pierre Rimbert, Un bâton dans la roue ; Manière de voir N° 141
(3) Raoul Marc Jennar et Renaud Lambert, Mondialisation heureuse, mode d’emploi ; Manière de voir N° 141.

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